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Bienvenue sur le blog du Mouvement de Février 2008 au Cameroun
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8 mai 2009

Rapport sur les droits de l'homme en 2008

Ambassade-USA-Cameroun2008

Le Cameroun a une population d’environ 18 millions d’habitants. C’est une république à régime présidentiel fort et à système de gouvernement multipartite, mais le Rassemblement Démocratique du Peuple Camerounais (RDPC) se maintient au pouvoir depuis sa création en 1985. Le président de la République détient le pouvoir de contrôler la législation et peut gouverner par voie de décrets. En 2004, le président du RDPC, Paul Biya, a été réélu à la présidence de la nation, poste qu’il occupe depuis 1982. L’élection a été entachée d’irrégularités, en particulier au niveau du processus d’inscription des électeurs, mais les observateurs ont conclu que les résultats du scrutin reflétaient la volonté de l’électorat. Les élections législatives et municipales de juillet 2007 ont été marquées par des anomalies significatives du processus électoral, parmi lesquelles l’opposition d’entraves à l’inscription et l’absence de mesures de protection suffisantes contre la fraude au niveau du scrutin signalées par les observateurs internationaux et nationaux.  Bien que les autorités civiles aient généralement maintenu un contrôle efficace des forces de sécurité, celles-ci ont parfois agi indépendamment de l’autorité gouvernementale.

Le bilan affiché par le gouvernement en matière de droits de l’homme est resté médiocre, et les atteintes aux droits de l’homme se sont poursuivies, en particulier après les grandes émeutes de février qui se sont déclenchées en protestation contre la hausse des prix des denrées alimentaires et des carburants. Les forces de sécurité ont commis de nombreux homicides. Elles se sont également livrées à des actes de torture, à des agressions physiques et à d’autres mauvais traitements, notamment envers des détenus et des prisonniers. Les conditions de vie dans les prisons étaient rudes et mettaient la vie en danger. Les autorités ont arrêté et détenu des citoyens anglophones sécessionnistes, des observateurs et activistes locaux des droits de l’homme, des personnes ne portant pas sur elles leur carte d’identité nationale, et d’autres citoyens. On a relevé des cas de détention préventive prolongée, parfois avec mise au secret, et d’atteintes à la vie privée des citoyens. Le gouvernement a limité la liberté d’expression, la liberté de la presse, la liberté de réunion et la liberté d’association, et il a harcelé des journalistes. Il a également imposé des restrictions à la liberté de circulation des citoyens. Parmi les autres problèmes figurent la corruption largement répandue dans la fonction publique, la violence sociétale et la discrimination à l’égard des femmes, la mutilation génitale féminine (MGF), la traite des êtres humains, principalement des enfants, et la discrimination envers les Pygmées, les minorités ethniques, les populations autochtones et les homosexuels. Le gouvernement a limité les droits des travailleurs et les activités des syndicats du travail indépendants. Le travail des enfants, la servitude héréditaire et le travail forcé, y inclus des enfants, sont des problèmes.

RESPECT DES DROITS DE L'HOMME

Section 1 Respect de l’intégrité de la personne, y compris 
 la protection contre :

a. Privation arbitraire ou illégale de la vie

Il n'a été signalé aucun cas d'exécutions illégales de nature politique commises par le gouvernement ou par ses agents ; toutefois, tout au long de l’année, les forces de sécurité ont continué de commettre des homicides illégaux. Les rapports faisant état de tels faits ont été plus nombreux que l’année précédente et le gouvernement a rarement poursuivi les agents pour usage de force excessive. L’augmentation du nombre d’homicides illégaux commis par les forces de sécurité est attribuable principalement à la réaction des forces armées aux violentes émeutes déclenchées par des frustrations économiques et politiques ayant sévi à Douala et dans des dizaines d’autres villes. Le gouvernement a signalé au moins trois cas d’homicides illégaux commis par les forces de sécurité au cours de l’année.

Au cours des émeutes de février, qui se sont répandues dans 31 localités dont Yaoundé et Douala, et de leur répression par les autorités, les forces de sécurité ont tiré sur des manifestants et des émeutiers et ont tué plusieurs personnes. Le gouvernement a fait état de 40 morts, mais des organisations non gouvernementales (ONG), telles que La Maison des droits de l'homme, ont déclaré que les forces de sécurité avaient tué plus de 100 personnes (voir la section 2.b.).

Il n’y a pas eu de nouveaux développements dans les affaires suivantes d’homicides commis par les forces de sécurité en 2007 : le meurtre de Michèle Thérèse Sename Bella, tuée par balles par la police en janvier ; le suicide de l’officier de police William Etenga, qui avait tué un chauffeur de taxi ; le meurtre par la police de deux chauffeurs de taxi tués par balles à Bamenda; et le meurtre par des gendarmes de trois hommes Mbororo tués par balles à Garoua.

Il y a eu des rapports signalant des cas de mauvais traitements infligés par des membres des forces de sécurité ayant causé la mort de prisonniers durant leur détention au cours de l’année.

Il y a eu de nouveaux développements dans l’affaire du meurtre en 2006 de Grégoire Diboulé, qui aurait été commis par Ni John Fru Ndi, président du Social Democratic Front (SDF), et par 21 autres officiels du SDF appartenant à une faction rivale du parti. Le 5 novembre, le tribunal de grande instance du Mfoundi (Yaoundé) a remis en liberté les 21 détenus en raison des conditions illégales de leur détention préventive. Le tribunal a également ordonné l’acquittement de Mbah Justice Mbah, l’un des co-accusés, en raison de l’illégalité de sa mise en accusation et de sa détention. Toutefois, le tribunal n’a pas abandonné les poursuites et l’audition, qui avait commencé le 3 décembre, a été renvoyée au 26 février 2009.

Au cours de l’année, les violences sociétales et les cas de justice sommaire envers des personnes soupçonnées de vol ont continué de causer des morts. C’est ainsi, par exemple, que la presse a signalé la survenue de 13 décès au cours de l’année, suite à des violences collectives ou à une justice sommaire, alors qu’en 2007 elle avait fait état de trois morts ayant résulté de bastonnades et d’incendies commis par les forces de sécurité. En 2006, la presse avait fait état de 43 décès déclarés.

A la fin janvier, à Tatum, petite localité du département du Bui dans la région du Nord-Ouest, une foule en colère a tué en les brûlant trois bandits qui s’étaient échappés de leur lieu de détention et qui avaient essayé de commettre un vol à main armée ; les efforts des gendarmes visant à secourir les trois voleurs ont échoué. A la fin de l’année, il n’avait toujours pas été engagé de poursuites contre les auteurs des faits.

Les violences collectives survenues au cours de l’année ont été attribuées en partie à la frustration du public causée par l’inefficacité de la police et par la remise en liberté sans inculpation d’individus arrêtés pour des infractions graves.

Il n’y a pas eu de nouveaux développements dans l’affaire de la mort de Walters Akwafe, victime de violences collectives et d’une justice sommaire.

b. Disparitions

Aucune disparition à caractère politique n’a été signalée au cours de l’année.

c. Torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants

Bien que la Constitution et la loi interdisent de tels actes, des rapports dignes de foi ont signalé que les forces de sécurité avaient torturé et battu des prisonniers et détenus, notamment des manifestants et un travailleur des droits de l’homme arrêtés  durant les émeutes de février, et leur avaient infligé d’autres mauvais traitements. Le gouvernement a rarement mené des enquêtes sur les faits ou puni les agents publics impliqués.

Dans une interview accordée le 5 mars au journal La Nouvelle Expression, Joseph Lavoisier Tsapy, avocat dans la Région Ouest et membre de la Ligue des droits et libertés, a décrit le traitement que les forces de sécurité avaient infligé à des personnes arrêtées durant les émeutes de février. Les forces de sécurité ont, à plusieurs reprises, déshabillé et battu des détenus puis les ont roulés dans des cendres de pneus brûlés et du verre cassé, leur causant ainsi de nombreuses blessures (voir la section 2.b.). A la fin de l’année, la Ligue des Droits et des Libertés et d’autres organisations de défense des droits de l’homme, en association avec les parents et les familles des victimes, procédaient encore à la compilation d’informations en vue de déposer plainte officiellement. 
 
Selon certains rapports, les forces de sécurité auraient détenu des personnes dans des lieux spécifiques où elles les auraient torturées et battues. Les forces de sécurité auraient également soumis des femmes, des enfants et des personnes âgées à des mauvais traitements. Par exemple, le 4 mars, pendant son procès à Douala, Bernard Songo, étudiant à l’Université de Douala arrêté lors des émeutes de février, a déclaré que des officiers de police l’avaient violemment battu, ainsi que deux de ses codétenus, dans les cellules du poste de police judiciaire du district. Les journalistes couvrant le procès ont indiqué que des traces de bastonnades étaient visibles sur le corps des victimes.

De nombreuses organisations internationales de défense des droits de l’homme et certains membres du personnel carcéral ont indiqué que la torture était largement pratiquée, mais la plupart des rapports n’ont pas identifié les victimes soit par crainte de représailles des autorités, soit parce qu’ils n’avaient pas confiance dans le système judiciaire, ou en ignoraient les engrenages.

Dans la prison de New Bell (Douala) et dans d’autres centres de détention autres que de haute sécurité, des gardiens ont infligé des bastonnades aux détenus, dont certains auraient été enchaînés ou parfois fouettés dans leurs cellules. Les autorités ont aussi administré des bastonnades à des détenus dans des cellules de détention temporaire de postes de police ou de gendarmerie.

Les forces de sécurité auraient fait subir aux prisonniers et aux détenus des traitements dégradants, consistant notamment à les déshabiller, à les enfermer dans des cellules fortement surpeuplées, à leur refuser l’accès à des toilettes ou autres installations sanitaires, et à les battre pour tirer d’eux des confessions ou des renseignements sur des criminels allégués. Les détenus en détention préventive ont signalé que les gardiens exigeaient parfois d’eux, sous le coup de la menace de mauvais traitements, qu’ils paient des « frais de cellule », qui sont des pots-de-vin versés aux gardiens pour que ceux-ci s’abstiennent de maltraiter les détenus.

Le 26 février, lors d’une visite à la Prison Centrale de Yaoundé à Kondengui, Divine Chemuta Banda, président de la Commission Nationale des Droits de l’Homme et des Libertés (CNDHL), a appris que beaucoup des militants du SDF incarcérés en 2006 en rapport avec la mort de Grégoire Diboulé avaient été traités de façon inhumaine et s’étaient vu refuser des soins médicaux.

Conditions de vie dans les prisons et les centres de détention

Les conditions de vie dans les prisons, fortement surpeuplées et malpropres, étaient rudes et mettaient la vie en danger. Le gouvernement n’a pas alloué de fonds pour remédier aux graves déficiences en matière d’alimentation, de soins de santé et d’assainissement qui existaient dans toutes les prisons. Toutefois, après une large couverture médiatique des conditions de vie en milieu carcéral et des émeutes et tentatives d’évasion subséquentes, le gouvernement a financé la construction de nouveaux établissements pénitentiaires dans tout le pays, dont un à Yaoundé et un à Moulvoudaye, dans la région de l’Extrême-Nord, qui étaient toutes deux en service à la fin de l’année.

Les prisonniers étaient hébergés dans des locaux délabrés datant de l’ère coloniale, où la population carcérale était de quatre à cinq fois supérieure à la capacité prévue. Ce surpeuplement était exacerbé par le grand nombre de détenus en détention préventive. Les fonctionnaires accusés de corruption étaient hébergés dans des locaux distincts et bénéficiaient d’un traitement spécial. Selon un rapport publié par des ONG, des cellules prévues pour 30 à 40 personnes en contiendraient plus de 100.

Les soins de santé et les soins médicaux étaient quasi inexistants dans les prisons et les cellules de détention des postes de gendarmerie et de police. Il a été fait état de décès de prisonniers attribués au manque de soins médicaux.

Il y a également eu des décès causés par les mauvais traitements des détenus. Le 13 janvier, par exemple, des détenus de la prison de New Bell (Douala) ont essayé de lyncher Ahmend Aliou, qui est décédé des suites de l’agression du fait que les autorités pénitentiaires ne l’ont pas fait soigner. Aucune mesure n’avait été prise à l’égard des autorités pénitentiaires à la fin de l’année. Le 14 janvier, à la suite du lynchage d’un prisonnier, le directeur de la prison de New Bell a déclaré à la presse que le surpeuplement, le fait de ne pas placer les prisonniers dans des quartiers séparés et les conditions de détention inhumaines étaient les principales raisons expliquant les violences fréquentes dans les prisons. Des ONG locales ont ajouté en tant que facteurs contributifs l’alimentation abominable, la corruption généralisée et les abus sexuels. Au début août, l’Action des Chrétiens pour l’Abolition de la Torture (ACAT), ONG qui rend visite régulièrement aux prisonniers, a qualifié la prison de New Bell « d’enfer sur terre ».

Il était attendu des familles qu’elles fournissent elles-mêmes la nourriture de leurs parents incarcérés. La prison de New Bell ne possédait que sept robinets à eau pour quelque 3 500 prisonniers, ce qui contribuait au manque d’hygiène, à la maladie et aux décès.

Les personnes incarcérées à la prison de New Bell pour actes homosexuels étaient en butte à la discrimination et à des violences de la part des autres prisonniers.

La corruption était largement répandue parmi le personnel pénitentiaire. Les prisonniers versaient des pots-de-vin aux gardiens pour obtenir d’eux des faveurs ou un traitement spécial, y inclus une remise en liberté temporaire.

Il y avait deux prisons distinctes pour femmes. Il y avait aussi quelques centres de détention préventive pour femmes ; en revanche, celles-ci étaient communément détenues avec les hommes, parfois dans les mêmes cellules, dans les postes de police et de gendarmerie. Les mères ont parfois choisi d’être incarcérées avec leurs enfants lorsque ceux-ci sont en bas-âge ou lorsqu’elles n’ont pas d’autre option pour s’occuper d’eux. Le Secrétaire d’État chargé de l’administration pénitentiaire a reconnu qu’il y avait de graves problèmes et a déclaré le 24 septembre, lors d’une formation sur les droits des détenus, que « les prisons camerounaises ne devraient plus être perçues ou gérées comme des lieux de répression, de torture ou d’autres abus divers ».

Les prisonniers juvéniles étaient souvent incarcérés avec les adultes, parfois dans les mêmes cellules ou les mêmes services. Des rapports dignes de foi ont fait état d’agressions sexuelles commises envers des prisonniers juvéniles par des adultes.

Les détenus en attente de procès étaient incarcérés dans les mêmes cellules que les criminels condamnés.

Certains prisonniers importants étaient séparés des autres et jouissaient d’un traitement relativement doux.

Les hommes adultes, les jeunes et les femmes étaient détenus ensemble dans les centres de détention préventive, où ils ne recevaient généralement ni nourriture, ni eau, ni soins médicaux. Le surpeuplement y était fréquent. Les gardiens acceptaient des pots-de-vin des détenus en échange de quoi ils leur consentaient de meilleures conditions de vie, permettant même à certains de rester dans des bureaux plutôt que dans une cellule. Les détenus dont les familles avaient été informées de leur incarcération dépendaient de celles-ci pour leur alimentation et leurs soins médicaux.

Dans la région du Nord et la région de l’Extrême-Nord, le gouvernement a continué de permettre aux chefs traditionnels, les « Lamibé », de détenir certaines personnes hors du système pénitentiaire de l’État, ce qui équivalait à créer des prisons privées. Nombreuses sont les personnes qui ont eu recours aux lamibé pour résoudre leurs différends. Il y avait, dans les palais des chefferies traditionnelles de Rey Bouba, Gashiga, Bibemi et Tcheboa, des prisons privées qui étaient réputées pour les graves abus qui s’y commettaient.

En 2007, un rapport a fait état d’un Lamido qui aurait utilisé des agents des forces de l’ordre pour extorquer des fonds et confisquer du bétail appartenant à des particuliers. Les autorités détenaient ces particuliers pendant des jours ou des semaines sans les autoriser à consulter un avocat, puis les faisaient comparaître à Garoua où les chefs d’accusation étaient rejetés systématiquement.

Le gouvernement a permis à des organisations humanitaires internationales d’avoir accès aux prisonniers. La Croix-Rouge locale ainsi que la CNDHL ont effectué des visites de prisons sans préavis peu fréquentes au cours de l’année. Le gouvernement a continué de permettre au Comité international de la Croix-Rouge (CICR) de visiter les prisons.

Le 23 septembre, les directeurs des prisons de Douala et de Yaoundé ont publié de nouveaux chiffres indiquant que la prison de New Bell, à Douala, construite initialement pour environ 800 détenus en hébergeait à présent 4 000 et que la prison de Kondengui, à Yaoundé, construite pour environ 700 détenus en hébergeait 3 500. En octobre, les autorités pénitentiaires de Bamenda ont déclaré publiquement que 700 détenus occupaient la prison qui avait été construite pour moins de 50 personnes.

d. Arrestations ou détention arbitraires

La Constitution et la loi interdisent les arrestations et la détention arbitraires; néanmoins, les forces de sécurité ont continué d’arrêter et de détenir arbitrairement des citoyens.

Rôle de la police et des forces de sécurité

La police nationale, la Direction Générale de la Recherche Extérieure (DGRE), service de renseignement national, le ministère de la Défense, le ministère de l’Administration territoriale et, dans une moindre mesure, la Garde présidentielle sont chargés de la sécurité intérieure. Le ministère de la Défense, qui englobe la gendarmerie, les forces armées et leur service de sécurité militaire, et la DGRE, relèvent tous d’un bureau de la présidence, ce qui établit un contrôle présidentiel solide des forces de sécurité. La police nationale comprend la force de sécurité publique, la police judiciaire, les forces de sécurité territoriales et la police des frontières. La police nationale et la gendarmerie ont pour principale responsabilité l’application des lois. En milieu rural, où la police n’est guère présente voire pas du tout, le principal organisme d’application des lois est la gendarmerie.

Les forces de police étaient peu efficaces, mal formées, sous-rémunérées et corrompues. L’impunité constituait un problème.

Selon divers rapports, les gens versaient des pots-de-vin à la police et aux autorités judiciaires pour obtenir leur liberté. Les forces de police exigeaient des pots-de-vin aux points de contrôle routiers et il a été rapporté que des citoyens influents payaient les forces de police pour qu’elles procèdent à des arrestations ou harcèlent les individus impliqués dans des différends personnels.

La population considérait la police comme inefficace, ce qui l’amenait fréquemment à recourir à la justice populaire (voir section 1.a.).

En août [2006], le Président a promulgué des décrets établissant des postes de police et nommant du personnel dans la région de Bakassi, région rétrocédée par le Nigéria ce même mois. En 2007, Mebe Ngo'o, le délégué général à la sûreté nationale, a créé de nouvelles unités et districts de police mobile à Yaoundé et à Douala pour renforcer le professionnalisme et accroître la visibilité de la police. Au cours de l’année, des enquêtes ont abouti à des sanctions envers plus de 50 officiers de police pour des infractions comprenant la corruption, la falsification de documents officiels, l’abus d’autorité, l’emploi d’une force excessive, l’extorsion de fonds, les arrestations arbitraires, le chantage et le vol avec circonstances aggravantes.

Le 13 février, M. Mebe Ngo'o a sanctionné le commissaire de police François Xavier Minyem, responsable de l’inspection des unités de la Division provinciale de la région du Littoral, qu’il a suspendu sans salaire pendant trois mois pour corruption. Le 22 avril, il a suspendu le commissaire de police principal Simon Menzouo de la Police judiciaire de la région de l’Est, pour corruption et détournement de biens confisqués en tant qu’éléments de preuve. Le 15 mai, il a également sanctionné pour corruption Francis Melone Mbe, directeur de la police des frontières, pour corruption en rapport avec l’émission de passeports.

A la fin août, des dizaines d’officiers de police ont terminé un stage de formation de trois mois portant sur les droits des citoyens, les droits de l’homme et les libertés individuelles.

Arrestation et détention

La loi exige des forces de l’ordre qu’elles obtiennent un mandat d’arrêt, sauf en cas de flagrant délit; toutefois, dans la pratique, la police s’est souvent abstenue de respecter ce droit. La loi prévoit que les détenus doivent comparaître promptement devant un magistrat, mais cette disposition n’a souvent pas été respectée. La police est autorisée à détenir les personnes en rapport avec un crime de droit commun un maximum de 24 heures, ce délai pouvant être prorogé trois fois avant la mise en accusation ; il est arrivé toutefois que la police dépasse ce délai. La loi autorise la détention sans mise en accusation par les autorités administratives, telles que les gouverneurs et les préfets, pendant des périodes renouvelables de 15 jours. La loi prévoit également que les détenus doivent avoir accès à un avocat et aux membres de leur famille ; toutefois, les détenus se sont fréquemment vu refuser l’accès à un avocat ainsi qu’aux membres de leur famille. La loi autorise la mise en liberté sous caution, permet aux citoyens d’interjeter appel et accorde le droit de se pourvoir en justice pour arrestation illégale, mais ces droits ont rarement été exercés.

Contrairement aux années précédentes, il n’a pas été fait état d’arrestations par la police ou la gendarmerie sur de fausses accusations le vendredi à midi ou dans l’après-midi. La loi prévoit une mise en examen judiciaire dans les 24 heures suivant l’arrestation, mais les tribunaux ne siègent pas le week-end, de sorte que les personnes arrêtées le vendredi sont maintenues en détention au moins jusqu’au lundi. La police et la gendarmerie effectuent de telles « arrestations du vendredi » après avoir accepté des pots-de-vin de personnes souhaitant procéder à des règlements de comptes personnels. Il n’y a pas de cas connus d’officiers de police ou de gendarmes qui aient été sanctionnés ou punis pour cette pratique. Les forces de sécurité et les autorités gouvernementales auraient, selon certains rapports, continué d’arrêter et de détenir arbitrairement des personnes et de les maintenir fréquemment en détention prolongée sans mise en accusation ou sans procès, et parfois au secret. Toutefois le nombre de cas rapportés est inférieur à celui de 2006.

Durant les émeutes de février, selon les chiffres de mars publiés par le Ministère de la Justice, les forces de sécurité ont arrêté dans le pays un total de 1 671 personnes (voir section 2.b.). Les ONG ont prétendu que les chiffres effectifs étaient plus élevés et que les forces de sécurité avaient arrêté des dizaines de spectateurs ne participant pas directement aux manifestations ou aux émeutes.

C’est ainsi, par exemple, que le 25 février, des gendarmes de Yaoundé ont arrêté André Blaise Essama, programmeur informaticien. Celui-ci a expliqué dans une interview accordée au journal Le Messager le 18 juin qu’en revenant d’une réunion d’affaires, son itinéraire l’avait amené à proximité d’une manifestation. Il s’est alors muni de son appareil photo et a commencé à prendre des photos. Emmanuel Anyon, officier de gendarmerie en civil l’a interpellé et l’a conduit au siège de la gendarmerie où il a été interrogé puis incarcéré, accusé d’atteintes à l’ordre public et de pillage. Le 20 mars, le tribunal a ordonné la remise en liberté de M. Essama en raison des accusations erronées émises à son égard. Ce dernier a déposé plainte contre deux officiers de gendarmerie, mais aucune mesure n’avait été prise dans l’affaire à la fin de l’année.

Le 1er mars, des gendarmes du Secrétariat d’État à la Défense ont fait usage de force excessive pour arrêter le chanteur Joe Kameni, dit Joe La Conscience, et son ami Léon Tengue, devant les bâtiments d’une ambassade étrangère à Yaoundé. Les deux hommes faisaient une grève de la faim pour protester contre la fermeture de Radio Équinoxe et d’Équinoxe TV de Douala sur ordre du gouvernement (voir section 2.a.). Le 19 mars, le tribunal de première instance de Yaoundé a condamné MM. Kameni et Tengue à six mois de prison pour participation à une réunion et manifestation illégales. Le 20 mai, le président a accordé une remise de peine aux deux hommes dans le cadre d’une amnistie générale accordée aux personnes condamnées à la suite des événements de février.

Parmi les autres arrestations à haute visibilité effectuées au cours de l’année figurent Mboua Massok, activiste politique arrêté à Douala en janvier pour trouble à l’ordre public, et Lapiro de Mbanga, chanteur populaire arrêté à Loum (région du Littoral) en avril pour incitation à l’émeute et pillage. La police a relâché M. Massok quelques heures après son arrestation. Le 24 septembre, le tribunal du Mungo a condamné M. Lapiro (alias Pierre Roger Lambo Sandjo) à trois ans de prison et 277 000 francs CFA (554 dollars) d’amende pour incitation à l’émeute et à la destruction de biens privés et de l’État. M. Lapiro a interjeté appel, mais son procès en appel a été repoussé jusqu’en janvier 2009.

La police a procédé à des arrestations arbitraires sans mandat d’amener lors d’opérations de ratissage de quartiers à la recherche de criminels et de biens volés. Les citoyens sont tenus d’avoir leurs papiers d’identité sur eux en tout temps et la police a fréquemment arrêté des gens ne pouvant pas produire de pièces d’identité lors de rafles.

La détention préventive prolongée constituait un grave problème. Le code de procédure pénal limite à 18 mois la détention préventive avant procès. Toutefois, selon les statistiques officielles publiées durant l’année, 70 % des 23 000 détenus incarcérés dans le pays étaient en attente de procès. En mai, le Barreau du Cameroun a signalé que beaucoup de ces détenus attendaient de passer en jugement depuis 5 à 10 ans. Ce nombre élevé de détenus en attente de procès était dû en partie à la complexité des affaires, aux pénuries de personnel et à la corruption. Le Barreau a corrélé la durée de détention prolongée à un manque d’avocats et à un système de suivi insuffisant qui entraîne fréquemment des pertes de dossiers.

La loi spécifie qu’après la conclusion d’une enquête, les prévenus mineurs ne peuvent pas être détenus sans procès plus de trois mois ; ce délai a été dépassé dans la pratique. En décembre 2007, le Foyer de l'Espérance, ONG ayant son siège à Yaoundé, a signalé que plusieurs détenus mineurs avaient été incarcérés à la Prison centrale de Yaoundé de six mois à un an.

Ces dernières années, certains rapports ont signalé que des prisonniers auraient été maintenus en prison après avoir purgé leur peine ou après qu’un tribunal ait ordonné leur élargissement.

Amnistie

Le 20 mai, le président Biya a amnistié des centaines de personnes condamnées pour avoir participé aux émeutes de février, ainsi que d’autres détenus, notamment 74 manifestants à Douala, 61 à Yaoundé et 36 à Bamenda. La grâce présidentielle ne s’appliquait pas aux détenus dont les appels étaient encore en instance à la fin de l’année.

En mai, les directeurs des prisons de Yaoundé et de Douala ont déclaré que malgré l’amnistie présidentielle, des centaines de détenus resteraient incarcérés tant qu’ils n’auraient pas payé les frais de justice et les dommages-intérêts qu’ils devaient.

e. Déni de procès équitable et public

La Constitution et la loi reconnaissent l’indépendance du pouvoir judiciaire, lequel reste néanmoins soumis à l’influence du pouvoir exécutif ; par ailleurs, la corruption et l’inefficacité y sont toujours de graves problèmes. Le système judiciaire relève du Ministère de la Justice. La Constitution désigne le Président comme « premier magistrat » et donc comme « chef » du pouvoir judiciaire et arbitre théorique de toute sanction prise envers le pouvoir judiciaire ; toutefois, le Président ne s’est pas acquitté de ce rôle. La Constitution précise que le Président est le garant de l’indépendance du système judiciaire. Il nomme également tous les juges sur avis du Conseil Supérieur de la Magistrature. Toutefois, le pouvoir judiciaire manifeste des signes modestes d’indépendance croissante. En septembre, la Cour Suprême a annulé six élections municipales ayant eu lieu en novembre 2007, dont certaines qui  avaient pour candidats des hauts responsables du RDPC.

Le système judiciaire comprend la Cour Suprême, une cour d’appel dans chacune des 10 régions et un tribunal de première instance dans chacun des 58 départements du pays.

Le système juridique allie côte à côte le droit national et le droit coutumier, et de nombreuses affaires civiles et pénales peuvent être entendues dans l’une ou l’autre de ces juridictions. Les tribunaux étatiques entendent généralement les affaires criminelles et les décisions des tribunaux coutumiers concernant les affaires de sorcellerie sont automatiquement référées aux tribunaux étatiques qui statuent alors en première instance. Le droit coutumier, appliqué dans les régions rurales, est fondé sur les traditions du groupe ethnique prédominant dans la région considérée et les autorités de ce groupe rendent la justice selon ce droit. Le droit coutumier est considéré comme valide s’il n’est pas « incompatible avec la justice naturelle, l’équité et la bonne conscience ». Toutefois, de nombreux citoyens des régions rurales ignorent quels sont leurs droits en vertu du droit civil et leur éducation leur a inculqué l’obligation de se soumettre au droit coutumier. Ce droit reconnaît en principe l’égalité des droits et du statut des personnes, mais les hommes peuvent limiter les droits des femmes en matière d’héritage et d’emploi, et certains systèmes juridiques traditionnels traitent les femmes comme étant la propriété légale de leur époux.

Les tribunaux coutumiers sont l’instance de premier recours pour régler les affaires civiles de nature familiale, telles que les questions de succession, d’héritage et de garde des enfants. Ces tribunaux n’ont compétence au civil qu’avec le consentement des deux parties. L’une ou l’autre des parties a le droit de soumettre le litige à un tribunal étatique et de faire appel de la décision d’un tribunal coutumier auprès d’un tribunal étatique.

Les tribunaux militaires peuvent avoir compétence sur des civils lorsque la loi martiale a été déclarée par le Président et dans les affaires liées aux troubles civils ou à des violences organisées armées. Ils sont également compétents pour juger des crimes de gangs, des affaires de banditisme et de vol de grand chemin. Le gouvernement a interprété ces règles très largement et a parfois eu recours aux tribunaux militaires pour juger des affaires concernant des groupes dissidents ayant fait usage d’armes à feu.

 Déroulement des procès

La loi garantit un procès public équitable où l’accusé est présumé innocent. Il n’existe pas de système de jury. Les accusés ont le droit d’être présents à leur procès et de consulter un avocat en temps opportun. Ils ont généralement été autorisés à interroger les témoins et à présenter des témoins et des preuves à l’appui de leur cause. Les accusés ont également eu accès aux preuves les concernant détenues par le gouvernement. Étant donné la faible rémunération des avocats commis d’office, la représentation juridique des économiquement faibles a souvent été de qualité médiocre. Le Barreau et certaines organisations bénévoles, telle que l’Association Camerounaise des Femmes Juristes, ont offert leurs services gratuitement dans certains cas. Les accusés peuvent se pourvoir en appel.

Des organisations d’avocats et de défense des droits de l’homme ont signalé plusieurs violations du code de procédure pénale commises par le gouvernement dans sa répression des troubles de février. Certains détenus incarcérés dans des locaux de la police ou de la gendarmerie n’ont pas reçu de soins médicaux et n’ont pas eu accès à un avocat. Jean de Dieu Momo, avocat des droits de l’homme, et Madeleine Afité, représentante de l’ACAT, ont dénoncé publiquement ces violations. Mme Afité a déclaré que des mineurs arrêtés n’avaient pas reçu d’assistance de leurs parents, d’avocats ou d’organisations de défense des droits de l’homme, contrairement à ce qu’exige le code.

Les juges ont entendu certaines affaires collectivement, bien que la loi prévoie que les procès doivent être individuels.

Le 3 mars, par exemple, le tribunal de première instance de Douala-Ndokoti a jugé des dizaines de jeunes sans que ceux-ci soient représentés ou assistés par des avocats. Informé de la situation par des avocats présents au Palais de justice pour d’autres causes, Charles Tchoungang, président du Barreau du Cameroun, a exigé la suspension des procès jusqu’à ce que le Barreau puisse désigner des avocats pour défendre les jeunes prévenus. Le juge a accepté de suspendre l’audience, qui a repris le lendemain une fois les jeunes dûment représentés.

Le 4 mars, la police a détenu 155 jeunes dont il était allégué qu’ils avaient participé aux émeutes de février et les ont amenés devant le tribunal de première instance de Douala, sales et vêtus de leurs seuls sous-vêtements. Leurs défenseurs, notamment l’avocate des droits de l’homme Alice Nkom, ont déclaré que les prévenus avaient subi des bastonnades et des traitements humiliants durant leur détention. En réponse aux protestations des avocats, le juge président du tribunal a ordonné que les prévenus soient vêtus décemment avant que le procès ne commence. Ces jeunes ont bénéficié de l’amnistie proclamée le 20 mai par le Président Biya.

Certains des procès ont également été marqués par la corruption. Selon plusieurs rapports de presse, les autorités judiciaires auraient accepté des paiements illicites de la part des familles de détenus en échange d’une réduction de la peine ou de l’élargissement pur et simple de leurs proches, notamment de jeunes. Le parti pris politique des juges (agissant souvent selon des instructions du gouvernement) a souvent eu pour effet d’interrompre les procès ou de prolonger leur durée de manière excessive du fait de longues suspensions d’audience. De nombreuses personnes bien placées politiquement ou appartenant à des entreprises influentes ont bénéficié d’une immunité quasi totale les protégeant de toutes poursuites et certaines affaires politiquement délicates ont été réglées par des pots-de-vin.

 Prisonniers et détenus politiques

Certains rapports ont indiqué l’existence de détenus politiques, parmi lesquels figuraient des citoyens anglophones militant en faveur d’une sécession par l’entremise d’une organisation illégale.

Au cours de l’année, le gouvernement a continué de détenir deux individus généralement considérés par les ONG de défense des droits de l’homme comme des prisonniers politiques, en raison d’irrégularités entachant leur procès et des limites imposées à leur accès à un avocat. Titus Edzoa, ancien ministre de la Santé et pendant longtemps aide du Président Biya, et Michel Thierry Atangana, directeur de la campagne en 1997 de M. Edzoa, ont été arrêtés en 1997, trois mois après que M. Edzoa eut démissionné de ses fonctions et posé sa candidature à la présidence de la République. Ils ont été jugés coupables de détournement de deniers publics et condamnés à 15 ans de prison.

 Procédures judiciaires civiles et recours

La Constitution et la loi garantissent l’indépendance du pouvoir judiciaire civil ; toutefois, celui-ci est resté soumis à l’influence du pouvoir exécutif et la corruption et l’inefficacité y constituent toujours de graves problèmes.

f. Ingérence arbitraire dans la vie privée, la famille, le lieu d’habitation ou la correspondance

La Constitution et la loi interdisent de tels actes ; toutefois, la protection contre ces actes est subordonnée aux « intérêts supérieurs de l’État » et des rapports crédibles ont fait état de cas où des officiers de police et des gendarmes auraient harcelé des citoyens, procédé à des perquisitions sans mandat et ouvert ou saisi du courrier postal avec impunité. Le gouvernement a continué de maintenir des militants de l’opposition et des dissidents sous surveillance. La police a parfois détenu des membres de la famille et des voisins de personnes soupçonnées d’activités criminelles.

La loi permet aux forces de police de pénétrer dans un domicile privé sans mandat pendant la journée si elles sont à la poursuite d’un criminel soupçonné de commettre un crime. Elles peuvent entrer dans un domicile privé à n’importe quelle heure à la poursuite d’un criminel observé en flagrant délit.

Au cours de l’année, la police a placé les maisons de responsables et de militants du Southern Cameroons National Council (SCNC) sous surveillance, effectué des perquisitions au domicile de certains dirigeants du Conseil et interrompu des réunions ayant lieu dans des locaux privés. Le SCNC est un groupe anglophone considéré comme illégal par le gouvernement car il préconise la sécession.

Une importante organisation de défense des droits de l’homme de Yaoundé a également signalé que les forces de sécurité avaient saccagé ses bureaux durant les événements de février.

La police peut être autorisée par un organisme administratif à effectuer des opérations de ratissage de quartier sans mandat. Ces opérations ont parfois comporté des entrées par effraction dans des maisons à la recherche de personnes soupçonnées d’actes criminels ou de biens volés ou illicites. Les forces de sécurité ont parfois procédé à des bouclages de quartiers, à des fouilles systématiques de maisons, à des arrestations parfois arbitraires et à des saisies d’articles suspects ou illégaux. En décembre, les forces de sécurité ont effectué des rafles à Douala dans les quartiers d’Akwa et Douala III (Logbaba) et, au cours de ces opérations, ont saisi du matériel volé, notamment des câbles électriques et téléphoniques provenant d’installations publiques, et ont arrêté des suspects.

Des citoyens non porteurs de carte d’identité ont été détenus jusqu’à ce que leur identité puisse être établie et ont alors été libérés. Plusieurs personnes se sont plaintes de ce que la police avait saisi arbitrairement des dispositifs électroniques et des téléphones portables. Certaines ont déposé plainte auprès des autorités. Après les raids de décembre à Douala, plusieurs personnes ayant été arrêtées ou dont les domiciles avaient été fouillés se sont plaintes publiquement des mobiles des forces de sécurité.

Des accusations ont continué d’être émises, en particulier dans les régions du Nord et de l’Extrême-Nord, selon lesquelles des chefs traditionnels auraient expulsé arbitrairement des personnes de leurs terres. En juin, à Bogo (département du Diamaré, région de l’Extrême-Nord), un villageois a déposé plainte auprès d’une ONG de défense des droits de l’homme locale contre le chef traditionnel qui avait saisi sa terre. Il n’y avait pas eu d’autres développements à la fin de l’année.

Section 2 Respect des libertés individuelles, notamment :

a. Liberté d'expression et liberté de la presse

La liberté d’expression et la liberté de la presse sont garanties par la loi, mais dans la pratique, elles ont continué d’être limitées par le gouvernement. Le gouvernement a arrêté et détenu arbitrairement des journalistes. Des hauts responsables du gouvernement et du RDPC ont usé de leur autorité pour harceler des journalistes et encourager leur arrestation et leur détention. Le gouvernement a appliqué les règlements relatifs aux médias de manière irrégulière, réservant souvent les exigences les plus strictes sélectivement aux critiques du régime. Ceci a souvent eu pour effet d’instaurer un climat propice à l’autocensure de la part des journalistes et des organisations de médias. Les autorités gouvernementales ont souvent utilisé les lois très générales sur la diffamation pour engager des poursuites contre les journalistes qui les avaient critiquées.

Le 4 septembre, Michel Mombio, directeur de publication du journal indépendant L’Ouest Républicain a été arrêté à Bafoussam et accusé de fraude, de tentative de chantage et de diffamation, après avoir écrit un article où il critiquait des membres du gouvernement. M. Mombio a été détenu au secret pendant deux jours puis transféré sans audition à Yaoundé, où jusqu’à la fin de l’année il attendait d’être jugé.  Au cours de l’année, la police a arrêté au moins trois autres journalistes ayant fait des reportages sur la corruption de haut niveau et les a détenus dans des conditions analogues.

Les gens étaient généralement libres de critiquer le gouvernement en public et en privé sans faire l’objet de représailles des autorités. Toutefois, il y a eu de nombreux cas où des responsables gouvernementaux ont menacé ou harcelé des personnes ou des organisations ayant critiqué les politiques gouvernementales ou exprimé des vues opposées à ces politiques, ou ont refusé d’accorder un traitement égal à ces personnes ou organisations.
 
La militante des droits de l’homme Madeleine Afité, par exemple, a signalé avoir reçu des menaces de fonctionnaires ou des appels anonymes en réaction à sa déclaration selon laquelle elle estimait que les émeutes de février et leur répression  avaient fait plus de morts que le gouvernement ne l’admettait.

En mars, l’organisation Conseil Patriotique et Populaire de la Jeunesse (CPPJ) a reçu des appels téléphoniques menaçants provenant de responsables militaires après avoir émis une déclaration où elle demandait au gouvernement de traiter des problèmes sociopolitiques sous-jacents ayant contribué aux troubles de février. Des membres des forces de sécurité ont détenu au secret au moins l’un des membres du CPPJ signataires de la déclaration. Cette personne a été relâchée par la suite, sans être mise en accusation.

Le gouvernement publiait un quotidien, Cameroon Tribune. Ce journal s’est abstenu de publier des rapports détaillés sur les protestations ou sur les partis politiques critiques du gouvernement, de critiquer ouvertement le parti au pouvoir ou de présenter les programmes gouvernementaux sous un jour défavorable.

Au cours de l’année, environ 200 journaux privés étaient publiés au Cameroun. La plupart, toutefois, paraissaient irrégulièrement, généralement en raison d’un manque de fonds ; seuls 25, estime-t-on, étaient publiés régulièrement. Ils étaient diffusés principalement dans les zones urbaines et la plupart d’entre eux ont continué de critiquer le gouvernement et de traiter de questions controversées, notamment la corruption, les atteintes aux droits de l’homme, l’homosexualité et les politiques économiques.

Le gouvernement a continué de décaisser des fonds de l’État pour appuyer des organisations de médias privées au cours de l’année. Selon les rapports publiés dans les médias, le gouvernement a octroyé ces fonds de manière sélective aux organisations qui se montraient moins critiques à l’endroit du gouvernement que d’autres et en leur donnant pour directives de publier des informations favorables au régime.

Au cours de l’année, le gouvernement s’est ingéré dans les activités des médias privés, imprimés et radiodiffusés.

Les journalistes ont fait l’objet, d’arrestations, de harcèlement et d’intimidation plus que l’année précédente. C’est ainsi, par exemple, qu’au lendemain des événements de février et sur ordre des autorités provinciales, les forces de sécurité ont restreint la liberté de la presse en arrêtant des journalistes, en les détenant, en les maltraitant physiquement, en les menaçant et en les harcelant d’autres manières.

Le 12 février, des gendarmes de Zoétélé ont arrêté Jean-Bosco Talla, éditeur du journal Le Front, bihebdomadaire de Yaoundé, et son collègue Simon Djomo. Les deux journalistes effectuaient un reportage sur la richesse inhabituelle de hauts responsables gouvernementaux de Zoétélé lorsqu’ils ont été appréhendés par des gendarmes qui les ont entravés et leur ont bandé les yeux. Ils ont alors été transférés secrètement de Zoétélé à Douala puis ramenés à Zoétélé sans mise en accusation et sans être autorisés à prendre contact avec un avocat ou leur famille pendant environ 24 heures. Les gendarmes les ont ensuite relâchés sans mise en accusation.

Le 3 mars, des membres de forces de sécurité de Yaoundé qui auraient appartenu à la Sécurité militaire (SEMIL) ont arrêté Jacques Blaise Mvié, directeur de la publication du journal La Nouvelle Presse. Le même jour, le journal avait publié un article sur une tentative de coup d’État alléguée et avait mentionné le ministre de la Défense Rémy Zé Meka. Remis en liberté trois jours après, M. Mvié a allégué que M. Zé Meka avait ordonné son arrestation. Le 6 mars, la SEMIL a ré-arrêté M. Mvié et l’a soumis à un interrogatoire de plusieurs heures. Le directeur de la SEMIL a déclaré à des reporters que cette ré-arrestation était une procédure normale étant donné que M. Mvié avait incriminé l’organisation en déclarant que c’était elle qui l’avait arrêté la première fois. La SEMIL a relâché M. Mvié et aucune accusation n’avait été portée contre lui à la fin de l’année.

Le 9 septembre, le quotidien indépendant La Nouvelle Expression signalait que des gendarmes avaient appréhendé et détenu Michel Mombio le 4 septembre après que son journal, L'Ouest Républicain, eut publié des articles critiques de Madeleine Tchuenté, ministre de la Recherche scientifique et de l’Innovation, et de Jacques Famé Ndongo, ministre de l’Enseignement supérieur. La police a transféré M. Mombio à Yaoundé, où il était encore en prison à la fin de l’année, en attente de son procès prévu pour le début 2009.

La radio est restée le média le plus important employé pour atteindre la plupart des citoyens. On comptait environ 70 stations de radio privées émettant dans le pays, les trois quarts d’entre elles étant situées`à Yaoundé et à Douala. La CRTV, organisme public, diffuse des émissions de radio et de télévision. En août 2007, le gouvernement a émis les premières licences accordées à deux stations de télévision privées, STV et Canal 2 International, à une station de radio privée, Sweet FM, et à un réseau de télévision par câble, TV+. Le gouvernement perçoit des redevances pour financer les programmes de CRTV, ce qui offre à cette société un net avantage par rapport aux stations de radio et de télévision indépendantes.

Le gouvernement exige des stations de radio rurales à but non lucratif qu’elles présentent une demande de permis d’émission, mais les dispense de frais d’enregistrement. Les organismes commerciaux de radio et de télévision sont tenus de présenter une demande de licence et d’acquitter des frais de demande lors de la soumission du dossier. Une fois la licence accordée, les stations doivent verser une redevance annuelle, qui pèse lourd dans le budget de certaines d’entre elles. Bien que le gouvernement n’ait pas émis de nouvelles licences de radiodiffusion au cours de l’année, certaines compagnies ont opéré sans avoir de licence.

Le 21 février, le ministre de la Communication a suspendu indéfiniment les émissions de Radio Équinoxe et d’Équinoxe TV, deux sociétés de médias appartenant au même groupe indépendant. Officiellement, la décision du ministre était fondée sur le fait que les propriétaires n’auraient pas acquitté les redevances de licence d’exploitation. Toutefois, la plupart des diffuseurs se sont trouvés en défaut de paiement de ces redevances et ils ont continué d’opérer dans la légalité. La conclusion des observateurs nationaux et internationaux a été que ces suspensions avaient des mobiles politiques, les deux organisations ayant diffusé des émissions critiques de la suppression par le président Biya des limites prévues dans la Constitution du nombre de mandats présidentiels. Le 4 juillet, l’ordre de suspension a été levé par le ministre après que les stations eurent versé 40 millions de francs CFA (80 000 dollars) sur le total de 100 millions de francs CFA (200 000 dollars) de redevances.

Le 28 février, tentant ainsi d’imposer des restrictions quant au contenu des diffusions, le ministre de la Communication Jean-Pierre Biyiti Bi Essam a instamment prié les propriétaires de médias électroniques d’employer un « ton d’apaisement » dans leur couverture des émeutes. Le même jour, l’émission de « Magic Attitude », programme interactif quotidien très prisé de la station de radio de Yaoundé Magic FM (partenaire de la Voix de l’Amérique), a été interrompue. Des gendarmes ont fait irruption dans les locaux de la station, sans mandat, ont interrompu les programmes et emporté tout le matériel de diffusion. Les médias ont rapporté que ce raid était illicite parce que le ministre de la Communication n’avait pas pris de mesures à l’encontre de Magic FM et que le ministre de la Défense, dont relève la gendarmerie, n’avait pas autorisé cette intervention. Le 4 juillet, le ministre de la Communication a levé l’interdiction, mais le matériel confisqué n’a pas été rendu.

Contrairement à l’année précédente, le Conseil National de la Communication, dont les membres sont nommés par le Président pour examiner les demandes de licence d’exploitation des diffuseurs, ne s’est pas réuni. En outre, un responsable officiel a suspendu le comité technique chargé de l’examen des demandes et a déclaré qu’il ne reprendrait ses activités qu’une fois que le gouvernement aurait ré-autorisé les médias dont les installations avaient été fermées à reprendre leurs activités. Plusieurs stations de radio communautaire rurale de faible puissance ont été subventionnées par l’Organisation des Nations Unies pour l’Education, la Science et la Culture ainsi que par des pays étrangers. Le gouvernement a interdit à ces stations d’aborder des sujets touchant à la politique.

La loi autorise les services de nouvelles étrangers à opérer au Cameroun mais elle exige qu’ils aient pour partenaire une station locale. La BBC, Radio France Internationale et Africa No.1 diffusent leurs émissions en partenariat avec CRTV.

La télévision a des niveaux de pénétration inférieurs à ceux des médias imprimés mais elle exerce une influence plus grande sur l’opinion publique. Le gouvernement a fermé Radio Équinoxe en raison de ses critiques sévères à l’égard du régime. Les cinq autres stations de télévision indépendantes ont échappé aux critiques gouvernementales, bien que leurs émissions d’information aient parfois porté sur la pauvreté, le chômage et la médiocrité de l’enseignement, en signalant les problèmes de négligence du gouvernement et de corruption.

Au cours de l’année, la direction de la CRTV a continué de donner des instructions précises à son personnel pour s’assurer que le point de vue gouvernemental prime en tout temps dans les émissions.

Le gouvernement est le plus gros acheteur d’annonces publicitaires du pays. Certaines sociétés de médias privées ont signalé que les responsables gouvernementaux faisaient usage de la promesse de placer des annonces publicitaires (ou de la menace de ne pas en placer) pour influer sur les reportages relatifs aux activités du gouvernement.

Le gouvernement et les responsables gouvernementaux ont fait usage des dispositions strictes des lois relatives à la diffamation pour faire taire les critiques. Ces lois autorisent le gouvernement, à sa discrétion et à la demande du plaignant, à criminaliser les poursuites civiles pour diffamation ou à intenter des poursuites pénales dans les cas d’allégation de diffamation visant le Président et d’autres hauts responsables gouvernementaux ; ces infractions sont passibles de peines de prison et de lourdes amendes. La loi sur la diffamation impose le fardeau de la preuve à l’inculpé. Les autorités gouvernementales ont abusé de cette loi pour empêcher les journalistes d’exposer dans leurs reportages la corruption et les comportements abusifs. En 2006, divers membres du gouvernement et des hauts fonctionnaires gouvernementaux avaient intenté des procès pour diffamation à des journalistes ; au cours de l’année considérée dans le présent rapport, sept fonctionnaires gouvernementaux en ont fait autant.

Le 7 juin, la Fédération internationale des journalistes a demandé au gouvernement de cesser d’intimider les journalistes, tout particulièrement ceux qui couvrent les scandales de corruption.

 Liberté sur Internet

Il n’y a pas eu de restrictions imposées par le gouvernement à l’accès à Internet ni de rapports selon lesquels le gouvernement aurait surveillé le courrier électronique ou les forums de discussion en temps réel sur Internet. Les personnes et les groupes pouvaient exprimer librement leurs opinions, de manière pacifique, par Internet, y inclus par le courrier électronique. Internet était accessible et utilisé par la population, encore que l’accès ait été limité par le coût et la lenteur des connexions.

Liberté d’enseignement et manifestations culturelles

Bien qu’il n’y ait pas eu de restrictions juridiques limitant la liberté d’enseignement, des informateurs des services de sécurité de l’État auraient été présents sur les campus universitaires. Des enseignants ont déclaré que l’appartenance à des partis politiques d’opposition ou la participation à des débats politiques publics critiques du gouvernement pouvaient avoir des effets néfastes sur leurs opportunités dans leur carrière et leur promotion.

Au cours de l’année, des responsables de la sécurité ont harcelé des gens du spectacle qui avaient chanté des chansons dénigrant des fonctionnaires gouvernementaux.

b. Liberté de réunion et d’association pacifiques

Liberté de réunion

La loi garantit le droit à la liberté de réunion ; toutefois, le gouvernement a restreint l’exercice de ce droit dans la pratique, notamment pendant et après les manifestations et les émeutes de février.

La loi exige des organisateurs de réunions, manifestations ou processions publiques qu’ils en notifient les autorités à l’avance, mais elle n’exige pas l’approbation préalable des rassemblements publics par les autorités et n’autorise pas celles-ci à s’opposer aux rassemblements publics qu’elles n’ont pas approuvés au préalable. Toutefois, des fonctionnaires ont affirmé régulièrement que la loi autorise implicitement le gouvernement à accorder ou à refuser la permission de tenir des réunions publiques. En conséquence, le gouvernement s’est souvent abstenu d’accorder une autorisation pour les réunions organisées par des personnes ou des groupes critiques des autorités et a fait usage de force pour s’opposer aux réunions pour lesquelles il n’avait pas délivré d’autorisation.

Les autorités ont refusé d’accorder la permission au SCNC de tenir des réunions et des rassemblements et les forces de sécurité ont arrêté et détenu certains activistes.

Les forces de sécurité ont interrompu par la force des manifestations, réunions et rassemblements de citoyens, de syndicats du travail et de groupes d’activistes politiques tout au long de l’année ; des manifestants ont été blessés, arrêtés et tués.

Le 10 décembre, des forces de police ont affronté un groupe qui s’était assemblé devant le siège de l’Association Citoyenne de Défense des Intérêts Collectifs (ACDIC) à Yaoundé. Elles ont arrêté le président de l’ACDIC Bernard Njonga et au moins une dizaine d’autres personnes. La police a blessé Théophile Nono qui a dû recevoir des soins médicaux pour lacération du cuir chevelu. Les forces de police ont justifié leurs actions en déclarant que l’ACDIC n’avait pas reçu l’approbation de tenir un rassemblement et que celui-ci bloquait l’accès à une artère publique. M. Njonga a été remis en liberté sous caution et devait comparaître le mois suivant pour répondre d’accusations de trouble de l’ordre public et de tenue d’un rassemblement non autorisé.

Le 15 janvier, Fai Yengo Francis, le gouverneur de la région du Littoral, a interdit toutes les réunions et manifestations publiques dans la région. Il a motivé sa décision par le souci de préserver l’ordre public. Des observateurs locaux et internationaux ont prétendu que cette interdiction empêchait les partis de l’opposition et les militants opposés à la réforme constitutionnelle d’exercer leurs droits. L’interdiction n’a pas été appliquée aux événements publics organisés pour soutenir le gouvernement et la RDPC. Devant les critiques du public, le gouverneur a levé cette interdiction le 29 juillet.

Le 19 janvier, le sous-préfet de Dschang, dans la région de l’Ouest, a interdit une manifestation organisée par l’Union des Populations du Cameroun, parti d’opposition, pour commémorer le 37e anniversaire de la mort de l’un de ses principaux dirigeants.

Le 13 février, dans le quartier de Bessengué, le Groupement Mobile d’Intervention (GMI) de Douala a interrompu un défilé du SDF organisé pour protester contre la réforme constitutionnelle. La police a fait usage de canons à eau, de camions et de gaz lacrymogène pour disperser les manifestants, et les a battus avec des matraques en caoutchouc.

Lors des émeutes de février, qui se sont répandues dans 31 localités, dont Yaoundé et Douala, et de leur répression subséquente par les autorités, les forces de sécurité ont tiré sur des manifestants et des émeutiers et en ont tué. Alors que les rapports officiels situent à 40 le nombre de morts, des ONG telles que La Maison des Droits de l'Homme prétendent que les forces de sécurité auraient tué plus de 100 personnes.

Le 23 février, par exemple, la police de Douala a tué par balles Lovet Ndima Tingha, vendeur de viande, lors d’une attaque menée par les forces de l’ordre contre une foule rassemblée pour participer à un défilé organisé par le SDF, principal parti de l’opposition. Le défilé avait pour objet de protester contre l’intention du Président Biya de supprimer les limites constitutionnelles concernant le nombre de mandats présidentiels. La presse a rapporté que les organisateurs du SDF avaient décidé de mettre fin à la manifestation par crainte de violences et que la police avait attaqué alors que la foule se dispersait. Des organisations de défense des droits de l’homme ont aidé la famille de M. Tingha à déposer plainte contre la police, mais il n’y avait pas d’autres informations disponibles sur l’affaire à la fin de l’année.

Le 26 février, des policiers du GMI de Bafoussam, région de l’Ouest, répondant à une manifestation violente, ont tué par balles Emanuel Tantoh, 23 ans. Des ONG de défense des droits de l’homme ont aidé la famille de M. Tantoh à déposer plainte contre la police, mais il n’y avait pas d’autres informations disponibles sur l’affaire à la fin de l’année. 
 
Il n’a pas été pris de mesures à l’encontre des forces de sécurité responsables des morts et des blessures ayant résulté de la dispersion par la force de manifestants en 2006 ou 2007.

Il n’y a pas eu de nouveaux développements dans l’affaire de septembre 2007 dans laquelle un préfet et son adjoint auraient ouvert le feu sur des lycéens et tué Jean Jorès Shimpe Poungou Zok et Marcel Bertrand Mvogo Awono à Abong-Mbang, dans la région de l’Est, au cours d’une manifestation de protestation contre une absence d’alimentation en électricité de la ville ayant duré quatre mois. Le gouvernement a promis d’ouvrir une enquête.

Le procès de quatre dirigeants de l’Association de défense des intérêts des étudiants, accusés en 2006 de rébellion et de troubles de l’ordre public, s’est poursuivi pendant l’année.

 Liberté d’association

La loi garantit la liberté d’association, mais le gouvernement a limité l’exercice de cette liberté dans la pratique.

Les conditions de la reconnaissance des partis politiques, des ONG ou des associations par le gouvernement sont particulièrement strictes, donnent lieu à des procédures interminables et sont appliquées inégalement. Ce processus a obligé la plupart des associations à mener leurs activités dans l’incertitude, ces activités étant tolérées mais sans approbation officielle.

La loi interdit les organisations qui plaident en faveur de tout type de sécession, ce qui a amené des agents gouvernementaux à troubler les réunions du SCNC au motif que le but de l’organisation rend ses réunions illicites.

c. Liberté de religion

La loi garantit la liberté de religion et le gouvernement a généralement respecté cette liberté dans la pratique.

La pratique de la sorcellerie est un délit ; toutefois les contrevenants n’ont généralement été poursuivis qu’en conjonction avec une autre infraction, telle qu’un meurtre. La sorcellerie est invoquée traditionnellement à titre d’explication commune pour les maladies de causes inconnues.

 Abus sociétaux et discrimination

La communauté juive est très petite et aucun acte antisémite n’a été signalé.

Pour une analyse plus détaillée, voir le Rapport sur la liberté de religion dans le monde de 2008 à www.state.gov/drl/irf/rpt.

d. Liberté de mouvement, personnes déplacées, protection des réfugiés et apatrides

Bien que la Constitution et la loi garantissent la liberté de mouvement dans le pays, le droit de se rendre à l’étranger, le droit à l’émigration et au rapatriement, les forces de sécurité ont régulièrement fait obstacle aux déplacements des personnes dans le pays et aux voyages à l’étranger au cours de l’année.

A la suite des émeutes de février, les barrages routiers et les points de contrôle dirigés par les forces de sécurité se sont multipliés dans les villes et sur la plupart des grandes routes, où l’extorsion de petits pots-de-vin de le harcèlement étaient monnaie courante. La police stoppait fréquemment des voyageurs pour vérifier leurs papiers d’identité, les documents d’enregistrement des véhicules et les récépissés d’impôts à titre de mesures de sécurité et de contrôle de l’immigration. Des rapports crédibles ont toutefois fait état de cas où la police avait arrêté et battu des personnes qui ne portaient pas sur elles leurs cartes d’identité comme l’exige la loi.

Le droit de se rendre à l’étranger a généralement été respecté. Toutefois, on a relevé au moins un cas de restriction à un voyage à l’étranger.

Le 2 mars, des officiers de la DGRE ont arrêté Jean Michel Nintcheu, député du SDF de la région du Littoral à l’aéroport international de Douala, alors qu’il s’apprêtait à se rendre en France. Malgré l’immunité parlementaire de M. Nintcheu, les officiers de la DGRE lui ont retiré son passeport mais l’ont relâché au bout d’une heure, sans mise en accusation officielle. Le 10 juin, les autorités ont rendu son passeport à M. Nintcheu.

La loi interdit l’exil forcé et le gouvernement n’en a pas fait usage ; toutefois, certains défenseurs des droits de l’homme et membres de l’opposition politique qui avaient quitté le Cameroun car ils se considéraient menacés par le gouvernement sont restés à l’étranger, se déclarant eux-mêmes en exil politique.

Personnes déplacées

Une centaine de personnes environ n’avaient pas réintégré leur domicile après les violences survenues entre les groupes ethniques Bali et Bawock en raison de litiges fonciers et à la suite d’une attaque de la tribu Mbessa par la tribu Oku.

En 2005, 10 000 à 15 000 citoyens des villages de Djohong et de Ngaoui (région de l’Adamaoua) et de leurs environs ont été déplacés à la suite d’attaques et d’actes de pillage par des groupes armés non identifiés venant de la République Centrafricaine (RCA). Des fonctionnaires de l’administration de la région de l’Adamaoua ont signalé qu’il restait des centaines de personnes déplacées. 
 
Au cours de l’année, le gouvernement a œuvré avec le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les Réfugiés (HCR) pour protéger et aider les personnes déplacées.

Protection des réfugiés

La loi garantit l’octroi d’asile ou du statut de réfugié conformément à la Convention des Nations Unies relative au statut des réfugiés de 1951 et à son protocole de 1967.  Le gouvernement a établi un système pour assurer la protection des réfugiés et il a accordé l’asile ou le statut de réfugié à un certain nombre de personnes. Dans la pratique, le gouvernement a assuré la protection contre l’expulsion ou le renvoi de réfugiés dans des pays où leur vie ou leur liberté seraient en danger.

Le gouvernement a également accordé une protection temporaire à certaines personnes qui ne remplissaient pas les conditions requises pour être considérées comme réfugiés en vertu de la convention de 1951 et de son protocole de 1967. Toutefois, certains non-citoyens ont prétendu que le statut de réfugié avait été refusé à des résidents de longue date. A la fin de l’année, le HCR a estimé que le pays avait accordé une protection temporaire à quelque 82 000 réfugiés, dont 62 000 venaient de la RCA, 12 000 étaient des réfugiés urbains (9 000 à Yaoundé et 3 000 à Douala), 4 500 du Tchad et 2 500 du Nigéria.

Le gouvernement a coopéré avec le HCR et d’autres organisations humanitaires pour venir en aide aux réfugiés et aux demandeurs d’asile. Au cours de l’année, le gouvernement a facilité l’entrée de certains réfugiés de la RCA et du Tchad et leur a fourni de l’aide.

Section 3 Respect des droits politiques : droit des citoyens à changer de gouvernement

La loi accorde aux citoyens le droit de changer de gouvernement de manière pacifique; toutefois, le Président Biya et le RDPC contrôlent le processus politique, notamment le pouvoir judiciaire et les organismes responsables de la conduite et de la supervision des élections. L’intimidation, la manipulation et la fraude électorales ont limité la capacité des citoyens à exercer ce droit lors des élections passées. En avril, l’Assemblée Nationale a adopté un amendement à la Constitution abrogeant les limites du nombre de mandats présidentiels et ajoutant des dispositions relatives à l’immunité présidentielle. Bien que des débats nationaux considérables sur la proposition aient eu lieu, l’Assemblée Nationale a, en dernière analyse, adopté les révisions d’une manière qui ne laissait pas de place aux débats et qui soulignait le contrôle illimité exercé par le RDPC sur tous les pouvoirs de l’État. Ni les électeurs ni leurs représentants élus n’ont eu la possibilité d’influer sur le résultat de cet exercice constitutionnel.

 Élections et participation politique

Lors des élections législatives de juillet 2007, les observateurs ont constaté l’exercice d’une supervision médiocre dans les bureaux de vote et une application laxiste de la loi électorale. Un processus d’inscription inutilement complexe a eu pour effet d’empêcher certains électeurs d’exercer leur droit de vote. Le gouvernement n’a pas appliqué certaines des améliorations électorales auxquelles il s’était engagé précédemment. Par exemple, malgré des assurances répétées au public, le gouvernement n’a pas pu fournir d’encre indélébile, moyen internationalement reconnu d’éviter les votes multiples, à de nombreux bureaux de vote. En dépit des efforts d’informatisation des inscriptions, les listes d’électeurs contenaient encore de nombreuses erreurs.

La Cour Suprême a reçu plus de 130 plaintes provenant de partis politiques après les élections, mais en a rejeté la plupart pour des motifs techniques. Elle a toutefois ordonné la tenue de nouvelles élections dans cinq circonscriptions pour 17 sièges au parlement, lesquelles ont eu lieu en 2007; le RDPC a remporté 13 sièges et les partis d’opposition quatre. Les observateurs ont noté certaines irrégularités ainsi que le faible taux de participation électorale.

En juillet, l’Observatoire National des Elections, organisme gouvernemental, a publié son évaluation des élections législatives et municipales de 2007. Il a fait mention dans son rapport de certaines carences dues au manque de coordination entre les diverses commissions électorales et à l’absence de procédures claires et uniformes pour les diverses phases du processus électoral (en particulier pour le processus d’inscription).

En 2004, le Président Biya, qui contrôlait le gouvernement depuis 1982, a été réélu avec environ 70 % des votes dans une élection largement considérée comme plus libre et plus régulière que les élections précédentes. Malgré des problèmes de gestion et des irrégularités, en particulier au stade de l’inscription des électeurs, la plupart des observateurs internationaux ont convenu que cette élection reflétait la volonté des électeurs. Le Groupe d’observateurs du Commonwealth a toutefois affirmé que l’élection manquait de crédibilité.

Durant sa session électorale de juin, l’Assemblée Nationale a adopté un amendement à la loi portant création d’Elections Cameroon, qui repousse la date limite de création de cette entité électorale de juin à décembre.

L’appartenance au parti politique détenant le pouvoir comporte des avantages significatifs, notamment lors de l’attribution de postes clés dans les établissements paraétatiques et dans la fonction publique. Le Président nomme tous les ministres, y inclus le Premier ministre ; il nomme aussi directement les gouverneurs de chacune des 10 régions. Il a le pouvoir de nommer des membres importants, à un niveau inférieur, des 58 entités administratives régionales. Les coûts élevés de l’enregistrement des partis et des candidats ont eu pour effet de restreindre l’activité politique.

Le droit des citoyens de choisir leurs gouvernants locaux est resté limité. Le gouvernement a considérablement accru le nombre de municipalités dirigées par des délégués nommés par le Président, dont l’autorité prime sur celle des maires élus, ce qui retire en fait tout pouvoir aux habitants de ces localités. Parmi les villes dirigées par des délégués figurent la plupart des capitales provinciales et certaines capitales départementales dans les régions favorables à l’opposition ; cette pratique est quasi absente dans les régions australes, qui tendent à appuyer le RDPC au pouvoir. Les municipalités administrées par un maire élu jouissent d’une autonomie locale limitée étant donné que c’est le gouvernement central qui leur fournit la plupart de leurs revenus et de leur personnel administratif.

Il y avait plus de 180 partis politiques enregistrés dans le pays. Toutefois, moins de 10 réunissaient des appuis de niveau significatif et seuls cinq détenaient des sièges à l’Assemblée nationale. Le RDPC avait la majorité absolue au sein de l’Assemblée Nationale; parmi les partis d’opposition figurait le SDF, ayant ses bases dans les régions anglophones du pays et dans certaines grandes villes. Les plus importants des autres partis d’opposition étaient l’Union Nationale pour la Démocratie et le Progrès, l’Union Démocratique du Cameroun et l’Union des Populations du Cameroun.

A de nombreuses occasions tout au long de l’année, les autorités ont refusé d’accorder la permission de tenir des rassemblements et des réunions à des individus ou à des organisations dont l’opinion divergeait de l’orthodoxie gouvernementale. En réponse au mécontentement croissant du public devant l’amendement constitutionnel proposé, le gouverneur de la région du Littoral Francis Fai Yengo a interdit les manifestations ou événements publics. Mais tandis que les autorités veillaient à l’application de cette interdiction pour la société civile et les groupes de l’opposition, elles ont permis aux événements pro-gouvernementaux et pro-RDPC de se dérouler. Par exemple, l'Association Citoyenne de Défense des Intérêts collectifs et Nouveaux Droits de l'Homme, toutes deux des ONG, se sont vu interdire de tenir des événements publics pour protester contre les actions du gouvernement au cours de l’année.

Le gouvernement a considéré le SCNC comme illégal parce qu’il préconise la sécession et les autorités ont refusé de l’enregistrer en tant qu’organisation politique. Au cours de l’année, les forces de sécurité ont arrêté préventivement une quarantaine de dirigeants, membres et supporters du SCNC pour les empêcher de participer à des réunions politiques non autorisées.

Le 9 février, par exemple, la police de Bamenda a arrêté préventivement 19 militants du SCNC réunis dans un domicile privé. Ces arrestations avaient pour but de les empêcher de célébrer la Journée des nations et peuples non représentés. Le 13 février, le procureur de Bamenda les a remis en liberté sous caution, en attente de l’émission d’actes d’accusation et de procès.

Conformément aux dispositions du code pénal nouvellement institué, les autorités ont remis en liberté en attente de procès des personnes qui avaient été détenues pour avoir participé à des rassemblements illicites du SCNC.

Les femmes détenaient 23 des 180 sièges à l’Assemblée Nationale, six des 61 postes ministériels au sein du cabinet, et quelques-uns des postes supérieurs des grands partis politiques, y inclus du RDPC au pouvoir.

Les Pygmées n’étaient pas représentés à l’Assemblée Nationale ni dans les postes gouvernementaux de niveau élevé.

 Corruption des fonctionnaires et transparence

La loi prévoit des sanctions pénales en cas de corruption des fonctionnaires et agents publics ; toutefois, le gouvernement n'a pas appliqué les dispositions en vigueur de manière efficace et les fonctionnaires se sont souvent adonnés à des pratiques de corruption avec impunité. Les indicateurs de la gouvernance mondiale de la Banque Mondiale reflètent le fait que la corruption est un problème grave. Selon les perceptions du public, les fonctionnaires du pouvoir judiciaire et de l’administration étaient disposés à recevoir des pots-de-vin dans pratiquement toutes les situations. La corruption était répandue à tous les niveaux du gouvernement.

Des poursuites ayant fait l’objet d’une certaine publicité ont été engagées contre des fonctionnaires gouvernementaux accusés de corruption au cours de l’année. Le gouvernement a, par exemple, sanctionné des dizaines de fonctionnaires pour corruption et mauvaise gestion.

Le 12 mars, la police a arrêté et détenu Paulin Abono Moampamb, ancien secrétaire d’État et maire de Yokadouma, petite ville de la région de l’Est, pour détournement de fonds publics. M. Moampamb a été placé en détention préventive où il était encore en attente de son procès à la fin de l’année.

Le 31 mars, la police a arrêté et détenu Polycarpe Abah Abah, ancien ministre des finances, et Urbain Olanguena Awono, ancien ministre de la santé publique, pour détournement de fonds. Les deux hommes ont été placés en détention préventive et étaient encore en attente de leur procès à la fin de l’année.

Le 1er août, la police a arrêté et détenu Jean Marie Atangana Mebara, ancien ministre d’État et Secrétaire Général de la Présidence de la République, pour corruption et détournement de fonds. M. Mebara était encore en détention préventive en attente de son procès à la fin de l’année.

Il y a eu de nouveaux développements dans les affaires de corruption à haute visibilité suivantes:

Le 11 juillet, le Tribunal de Grande Instance de Yaoundé a condamné Joseph Edou, directeur général du Crédit Foncier, société de financement immobilier, et André Boto'o a Ngon, ancien président du conseil d’administration de ladite société, à 40 ans de prison chacun pour corruption. Vingt et un autres anciens employés du Crédit Foncier ont été jugés coupables et condamnés à des peines de prison allant d’un à 45 ans de prison. Le tribunal a également condamné les 23 accusés à verser 8,5 milliards de francs CFA (17 millions de dollars) et a ordonné la confiscation de leurs biens.

Le 16 avril, la Cour d’Appel de Yaoundé a réduit la peine de prison de Gérard Ondo Ndong, ancien directeur général du FEICOM (organisme paraétatique octroyant des financements de projets aux municipalités) de 50 à 20 ans de prison. Elle a également réduit les peines de prison de trois de ses co-accusés de 48 à 20 ans de prison.

La Constitution et la loi exigent des hauts fonctionnaires gouvernementaux, y inclus les membres du gouvernement, qu’ils déclarent leur fortune, mais à la fin de l’année, le Président n’avait pas encore signé le décret d’application nécessaire.

Il n’y avait pas de lois permettant aux citoyens d’accéder à l’information publique détenue par le gouvernement et cet accès était difficile à obtenir. La plupart des documents du gouvernement, tels que les statistiques, la correspondance échangée entre les diverses administrations, les projets de loi et les rapports d’enquête, n’étaient pas mis à la disposition du public ou des médias.

Section 4 Attitude du gouvernement concernant les enquêtes internationales et non gouvernementales sur des allégations de violation des droits de l’homme

Un certain nombre de groupes de défense des droits de l’homme nationaux et internationaux ont généralement mené leurs activités, effectué des enquêtes sur divers cas concernant les droits de l’homme et publié les résultats de celles-ci sans restrictions de la part du gouvernement. En revanche, à plusieurs reprises, des fonctionnaires gouvernementaux ont réduit l’efficacité d’ONG de défense de droits de l’homme locales au cours de l’année en harcelant leurs membres, en limitant leur accès à des prisonniers, en refusant de partager des informations, en les menaçant de violence et en faisant usage de violence envers eux.

Malgré ces restrictions, de nombreuses ONG de défense des droits de l’homme nationales ont mené leurs activités dans le pays en toute indépendance, notamment la Ligue Nationale des Droits de l’Homme, l’Organisation des Droits de l’Homme et des Libertés, l’Association des Femmes contre la Violence, le Mouvement pour la Défense des Droits de l’Homme et des Libertés, et l’Association Camerounaise des Femmes Juristes. Le gouvernement a collaboré avec des ONG nationales pour traiter des problèmes du travail des enfants, des droits des femmes et de la traite d’êtres humains.

Le 16 février, la police anti-émeutes de Douala a arrêté, battu, trainé sur le sol et déshabillé Aïcha Ngo Eheg, militante des droits de l’homme et membre du Cri des Femmes Camerounaises, un groupe de défense des droits de l’homme de Douala. Mme Ngo Eheg s’était rendue avec d’autres manifestants dans le quartier de Bepanda de Douala pour protester contre la réforme constitutionnelle. Selon sa déclaration publique, les policiers s’en sont pris à elle parce qu’elle avait essayé de les arrêter de harceler un jeune manifestant. A la fin de l’année, Mme Ngo Eheg n’avait pas encore décidé si elle allait déposer plainte contre la police.

Le gouvernement a coopéré avec des organisations gouvernementales internationales et a autorisé des visites de représentants des Nations Unies et d’autres organisations telles que le CICR. En juillet, le premier ministre Inoni a rencontré des représentants de Human Rights Watch et d’autres ONG internationales.

Bien que la CNDHL ait été limitée par manque de fonds, elle a mené au cours de l’année plusieurs enquêtes sur les atteintes aux droits de l’homme, visité des prisons et organisé plusieurs séminaires sur les droits de l’homme pour des fonctionnaires judiciaires, du personnel de sécurité et d’autres fonctionnaires gouvernementaux. Bien que la commission ait rarement critiqué publiquement le gouvernement pour ses violations des droits de l’homme, son personnel est intervenu auprès de fonctionnaires gouvernementaux dans certains cas spécifiques d’atteintes aux droits de l’homme par les forces de sécurité. Au cours de l’année, elle a poursuivi ses efforts visant à faire cesser la pratique des « arrestations du vendredi » (détention de personnes le vendredi pour prolonger le délai d’attente avant la comparution en justice) et s’est efforcée d’obtenir que des soins médicaux soient dispensés à des suspects emprisonnés. Des fonctionnaires gouvernementaux ont également assisté à plusieurs séminaires organisés par la commission. Le 5 février, la CNDHL a lancé son site web qui contient des informations sur elle-même et sur ses activités. En 2006, le Président a signé un décret nommant des nouveaux membres de la commission et renvoyant tous les membres en place, à l’exception du président.

La Commission des lois constitutionnelles, des droits de l'homme et des libertés, de la justice, de la législation et du règlement et de l'administration de l’Assemblée nationale est chargée d’examiner tous les projets de loi relatifs aux droits de l’homme présentés par le gouvernement à l’Assemblée. Le gouvernement n’a pas présenté de tels projets de loi au cours de l’année.

Le Ministère de la Justice a publié durant l’année son propre rapport sur les droits de l’homme pour 2007 qui s’attachait principalement à énumérer les mesures gouvernementales prises pour traiter des questions relatives aux droits de l’homme, telles que les mesures judiciaires et disciplinaires prises à l’égard des fonctionnaires corrompus.

Section 5 Discrimination, abus sociétaux et traite des  personnes

La loi n’interdit pas explicitement la discrimination fondée sur la race, la langue ou le statut social ; en revanche, elle interdit la discrimination fondée sur le sexe et précise que tout le monde a des droits égaux et des obligations égales. Le gouvernement, toutefois, n’a pas appliqué ces dispositions de manière efficace. La violence et la discrimination envers les femmes, la traite des personnes et la discrimination envers les minorités ethniques et les homosexuels constituaient des problèmes.

Femmes

La loi interdit le viol, mais la police et les tribunaux ont rarement mené des enquêtes et engagé des poursuites dans les cas de viol. Les médias ont rapporté au moins sept cas de viol au cours de l’année, mais les autorités n’ont arrêté personne. En raison des tabous sociaux associés à la violence sexuelle, il y a lieu de penser que de nombreux cas de viol ne sont pas déclarés.

Un sondage de 2005 cité dans Cameroon Tribune a indiqué que 39 % des femmes qui vivent avec un homme (mariées avec lui ou non) étaient victimes de violences physiques et 28 % de violences psychologiques. La loi n’interdit pas spécifiquement la violence domestique, bien que l’agression soit interdite et passible de peines de prison et d’amendes. Les défenseurs des droits des femmes ont affirmé que les sanctions pour violence domestique n’étaient pas suffisantes. La violence conjugale n’est pas un motif de divorce.

Contrairement à l’année précédente, les ONG n’ont pas mené cette année de campagne de sensibilisation pour lutter contre le repassage des seins, pratique qui est le fait des membres féminins de la famille.

Bien qu’interdite par la loi, la prostitution est tolérée et se pratique principalement dans les zones urbaines et les lieux fréquentés par les touristes.

En juin 2007, le gouvernement a signé la Charte contre le tourisme sexuel qui fournit des directives éthiques à l’industrie du tourisme.

Bien que la loi interdise le harcèlement sexuel, très peu de cas ont été déclarés ou ont fait l’objet de poursuites au cours de l’année. Le gouvernement n’a pas consacré de campagnes d’éducation du public à la question et il n’y avait pas de statistiques sur l’ampleur du phénomène.

Malgré les dispositions constitutionnelles reconnaissant les droits des femmes, celles-ci ne jouissent pas des mêmes droits et privilèges que les hommes et certaines dispositions de droit civil leur sont préjudiciables.

La loi permet au mari de s’opposer à ce que son épouse travaille dans une profession distincte si l’objection est fondée sur le souci de l’intérêt du ménage et de la famille ; le mari peut également mettre un terme aux activités commerciales de son épouse en notifiant le greffier du tribunal de commerce de son opposition fondée sur l’intérêt de la famille.

Le droit coutumier est bien plus discriminatoire envers les femmes car, dans de nombreuses régions, la femme était considérée traditionnellement comme la propriété de son mari. En raison de l’importance attachée aux coutumes et aux traditions, il est fréquent que les dispositions du droit civil protégeant les femmes ne soient pas respectées.

Enfants

Au cours de l’année, le gouvernement a déployé certains efforts pour protéger les droits et le bien-être des enfants, notamment en participant à des séminaires sur les droits des enfants. Au cours de l’année, le ministre des affaires sociales et d’autres dirigeants de haut niveau ont fait des déclarations et présenté des plans d’action gouvernementaux concernant l’amélioration du sort des enfants.

La loi garantit le droit des enfants à l’éducation, et l’école est obligatoire jusqu'à l’âge de 14 ans révolus et gratuite dans les écoles primaires publiques. Étant donné que les parents avaient à payer des frais pour les uniformes et les manuels scolaires dans l’enseignement primaire et que les frais de scolarité et autres dans l’enseignement secondaire étaient élevés, l’éducation était dans une grande mesure trop coûteuse pour de nombreux enfants. Le gouvernement a pris des mesures au cours de l’année pour améliorer l’accès à l’enseignement, telles que la construction de nouvelles salles de classe, le recrutement de nouveaux enseignants et l’installation de bornes-fontaines.

D’après les statistiques officielles de 2005, 72 % des filles de 6 à 14 ans étaient scolarisées, contre 81,3 % des garçons du même groupe d’âge. Selon le Fonds des Nations Unies pour l’Enfance (UNICEF), le taux brut de scolarisation dans le secondaire était de 36 % pour les garçons et de 29 % pour les filles. Le faible taux de scolarisation continue d’être attribué à la cherté de l’éducation, aux préjugés socioculturels, au mariage précoce, au harcèlement sexuel, aux grossesses non désirées et aux travaux ménagers.

L’ampleur de la maltraitance des enfants n’est pas connue, mais les organisations de défense des droits des enfants ont ciblé ce problème. La presse a souvent fait état d’enlèvements et de mutilations d’enfants et même d’infanticides.

Plusieurs articles crédibles ont été publiés décrivant des cas de mères (généralement jeunes, au chômage et célibataires) qui abandonnaient leur nouveau-né dans la rue, dans des poubelles et dans des latrines.

La loi n’interdit pas la MGF (mutilation génitale féminine), qui est pratiquée dans des zones isolées des régions Extrême-Nord, Est et Sud-Ouest.

Les migrations intérieures ont contribué à l’expansion de la  MGF dans différentes régions du pays. La MGF prend en majorité la forme de la clitoridectomie. La forme la plus grave, l’infibulation, est pratiquée dans la région de Kajifu dans la région du Sud-Ouest. Les MGF sont généralement pratiquées sur les petites filles en bas âge et les préadolescentes. Les centres de santé publique des zones où les MGF sont fréquentes ont informé les femmes sur les conséquences nocives de ces pratiques ; toutefois, le gouvernement n’a pas engagé de poursuites contre les personnes accusées d’avoir pratiqué les MGF.

Le 6 février, lors de la première Journée internationale contre la mutilation génitale féminine, la Ministre de la Promotion de la Femme et de la Famille a condamné cette pratique et a appelé tous les citoyens à se joindre à la lutte contre la MGF.

Bien que l’âge minimum du mariage soit de 15 ans pour les filles, de nombreuses familles arrangent leur mariage dès l’âge de 12 ans. Le mariage précoce est répandu dans les régions septentrionales de l’Extrême-Nord, de l’Adamaoua et du Nord, et tout particulièrement dans les zones isolées de l’Extrême-Nord où de nombreuses filles d’à peine neuf ans sont exposées aux graves dangers que présente la grossesse pour la santé à ce jeune âge. Il n’y avait pas de statistiques sur la prévalence du mariage précoce.

Bien qu’il n’y ait pas de chiffres exacts disponibles, le pays possédait un nombre important d’enfants déplacés ou d’enfants des rues, qui vivaient pour la plupart dans les régions urbaines, à Yaoundé et à Douala, par exemple.

A partir de janvier, le Ministère des Affaires Sociales, en association avec certaines communautés et divers conseils, a établi le « Projet de lutte contre le phénomène des enfants de la rue (EDR) ». Ce projet a recueilli des informations sur le phénomène, offert des soins psychosociaux et accru les capacités d’accueil de foyers spécialisés. La phase pilote du projet a été lancée le 9 avril, à Maroua, dans la région de l’Extrême-Nord, par le Ministère des Affaires Sociales, qui a également lancé le projet le 14 avril à Douala pour les régions du Littoral et du Sud-Ouest. Le ministère a signalé qu’environ 2 000 enfants vivaient dans les rues des grands centres urbains du pays. En avril et en mai, un recensement effectué à Yaoundé et à Douala a révélé la présence de 155 enfants de la rue à Yaoundé et de 280 enfants de la rue à Douala. Le 14 mai, la ministre des Affaires Sociales a lancé une opération conçue pour rendre 150 enfants à leur famille ; le 30 décembre, elle a révélé que l’opération avait permis à 119 des 435 enfants identifiés à Yaoundé et à Douala de rentrer chez eux.

Traite des personnes

La loi n’interdit pas toutes les formes de traite des personnes et des rapports ont signalé que des personnes faisaient l’objet d’une telle traite en provenance de l’étranger, vers l’étranger et à l’intérieur du pays. La loi criminalise la traite des enfants et l’esclavage et interdit la prostitution, le travail forcé et d’autres crimes liés à la traite des personnes.

Une étude de l’Organisation Internationale du Travail (OIT) menée en 2000 à Yaoundé, Douala et Bamenda indiquait que 84 % de la main-d’œuvre enfantine employée dans ces trois villes provenait de la traite des personnes. Des ONG locales estimaient que ces statistiques étaient toujours exactes pour l’année considérée dans le présent rapport. Dans la plupart des cas, des intermédiaires se présentant comme des hommes d’affaires prenaient contact avec les parents de familles nombreuses ou les gardiens d’orphelins et leur promettaient d’aider les enfants en assurant leur éducation ou leur formation professionnelle. L’intermédiaire versait aux parents une somme de 6 000 francs CFA (12 dollars), en moyenne, avant d’emmener l’enfant dans une ville où celui-ci était soumis à un travail forcé très peu rémunéré. Dans 4 cas sur 10, l’enfant était un étranger amené dans le pays pour fournir de la main-d’œuvre. L’étude indiquait également que le pays était un point de transit pour les trafiquants régionaux, qui transportaient des enfants venant du Nigéria, du Bénin, di Niger, du Tchad, du Togo, de la République du Congo, et de la RCA pour en faire des travailleurs domestiques asservis, des ouvriers agricoles ou pour les exploiter sexuellement. Des citoyens camerounais ont également été victimes de la traite des personnes à destination de l’Afrique du Sud.

Ce sont traditionnellement les femmes et les enfants qui sont les plus exposés aux risques de la traite, généralement à des fins d’exploitation sexuelle ou de travail forcé. La plupart des opérations de traite des enfants ont lieu à l’intérieur du pays, alors que la plupart des opérations de traite des femmes sont orientées vers l’étranger. Selon des preuves anecdotiques recueillies par la CNDHL, les femmes ont souvent été « embauchées » pour être envoyées dans des centres de prostitution, fréquemment situés en Europe. La méthode consiste généralement à amener les femmes à croire en une proposition de mariage faite par un homme d’affaires étranger. A leur arrivée à leur destination étrangère, les femmes sont souvent réduites à la servitude. Des rapports crédibles ont indiqué que certains trafiquants se servaient de leurs victimes pour en recruter d’autres. Les filles victimes de la traite intérieure étaient recrutées dans les régions de l’Adamaoua, du Nord, de l’Extrême-Nord et du Nord-Ouest et amenées à Douala et à Yaoundé pour y travailler comme domestiques, vendeuses des rues ou prostituées.

En 2007, par exemple, un responsable local de l’application des lois a signalé que des trafiquants introduisaient illégalement dans le pays des dizaines d’enfants, certains n’ayant pas plus de huit ans, en provenance de Bakassi (Nigéria) pour un pêcheur nigérian. Aucune mesure n’a été prise pour résoudre ce problème, en raison d’un manque de contrôles administratifs efficaces.

L’esclavage est illégal dans le pays et la loi punit de 10 à 20 ans de prison les personnes coupables de la pratique de l’esclavage ou la traite des personnes. Il y a toutefois eu des rapports crédibles émanant d’anciens esclaves faisant état de servitude héréditaire dans certaines chefferies de la région du Nord. Il a été rapporté, par exemple, que le Lamido (chef musulman traditionnel) de Rey Bouba (région du Nord) avait des serviteurs héréditaires dans son palais. Bien que le Lamido ait été remplacé par son fils en 2004, les serviteurs héréditaires avaient décidé de rester, décision qui, selon certaines informations, aurait été motivée par des considérations culturelles.

La loi prévoit des peines de prison de 6 mois à 20 ans pour toute personne ayant commis des crimes en rapport avec la traite des personnes.

Malgré l’absence de statistiques due au fait que les trafiquants peuvent être poursuivis au titre de différentes sections du code pénal, selon certaines informations, le gouvernement aurait engagé des poursuites contre des trafiquants de personnes au cours de l’année. En janvier, la gendarmerie de la région du Nord-Ouest a arrêté trois trafiquants qui amenaient sept enfants de 12 à 17 ans dans la région du Centre pour en faire des travailleurs forcés. L’affaire était en instance à Bamenda à la fin de l’année.

Le Ministère du Travail et de la Sécurité Sociale est responsable au premier chef de la lutte contre la traite des personnes, mais les moyens financiers dont il dispose sont très insuffisants.

Le gouvernement a continué de lutter contre la traite des personnes par l’entremise d’un comité interministériel, dans le cadre d’un programme conçu pour retrouver les enfants victimes de la traite et pour assurer leur retour chez eux. En outre, le gouvernement du Cameroun a coopéré avec le gouvernement du Gabon, du Nigéria, du Togo et du Bénin pour lutter contre la traite des personnes au moyen d’un échange d’informations et en élaborant une législation commune sur la traite des personnes. Le bureau d’Interpol dans le pays a également joué un rôle significatif dans les mesures de lutte contre la traite prises par le gouvernement.

Le gouvernement a continué de travailler avec des ONG locales et internationales pour héberger temporairement les victimes de la traite et pour les aider. L’ONG Catholic Relief Services a lutté contre la corruption dans les établissements d’enseignement locaux qui mène à la prostitution enfantine. L’UNICEF a également mené des activités de lutte contre la prostitution des filles tout au long de l’année.

Le gouvernement a continué de renforcer la sensibilisation des responsables de la sécurité et des fonctionnaires locaux dans les zones où la traite des personnes pose problème. La radio et la télévision nationales ont diffusé des campagnes d’information et d’éducation ainsi que des spots d’information sur la lutte contre la traite des personnes. Le gouvernement a surveillé les caractéristiques de l’immigration et de l’émigration pour repérer les signes de traite des personnes. Dans les aéroports et les ports ainsi qu’aux frontières, la Police des frontières a indiqué avoir mis main sur de nombreuses opérations de traite de personnes mais elle n’a pas donné de détails sur les affaires dont il s’agissait.

Le rapport annuel du département d’État sur la traite des personnes est disponible à www.state.gov/g/tip.

Personnes handicapées

La loi garantit certains droits aux personnes handicapées, notamment l’accès aux bâtiments publics, le traitement médical et l’éducation, et le gouvernement est tenu de subvenir en partie aux frais d’éducation des personnes handicapées, de les employer dans la mesure du possible et de leur fournir une assistance publique en cas de besoin. L’accès à l’enseignement public secondaire est gratuit pour les personnes handicapées et pour les enfants de parents handicapés. En pratique, il y avait peu de facilités pour les personnes handicapées et une assistance publique limitée; le manque d’établissements et de soins pour les handicapés mentaux était particulièrement aigu. La société tendait généralement à ostraciser les personnes porteuses de handicaps et beaucoup considéraient que la responsabilité d’aider ces personnes incombait aux églises ou aux ONG étrangères.

Au cours de l’année, la Première dame Chantal Biya a assisté aux événements de la Journée nationale d’action et de solidarité, le Ministère des Affaires Sociales a parrainé une exposition au Musée National où les personnes handicapées ont pu présenter certains de leurs travaux et où, par exemple, des aveugles ont exposé des chaises en rotin.

Minorités nationales, raciales et ethniques

La population compte plus de 200 groupes ethniques, entre lesquels les allégations de discrimination ont été fréquentes et crédibles. Les groupes ethniques ont souvent accordé un traitement préférentiel à leurs propres membres dans la vie sociale comme en affaires. Les membres du groupe béti-bulu du sud du pays, auquel appartient le Président, détiennent des postes clés et sont représentés dans une mesure disproportionnée au gouvernement, dans les entreprises publiques, dans les forces de sécurité et au sein du RDPC, parti au pouvoir. C’est ainsi que le ministre de la défense, le délégué général à la sûreté nationale et le ministre de la communication étaient tous originaires de la région du Sud, les deux derniers venant du même département que le Président.

Le 6 juillet, à Akonolinga (région du Centre), plusieurs personnes ont été blessées et tuées lors de violences à motivation ethnique. Les faits se sont produits lorsqu’une équipe de football de la ville de Dschang, Département de la Ménoua, dans la région de l’Ouest, région dominée par les Bamiléké, a infligé une défaite à l’équipe de football locale. Des membres de la tribu des Yébékolo ont alors recherché des Bamiléké et les ont violemment agressés. Le gouvernement a mené une enquête sur l’incident mais personne n’avait été arrêté à la fin de l’année.

Il a été rapporté au cours de l’année que Alhadji Baba Ahmadou Danpullo, homme d’affaires richissime ayant des accointances avec le gouvernement, a trompé des femmes Mbororo pour avoir des relations sexuelles avec elles, a déplacé de force des Mbororo et s’est approprié leur terre et leur cheptel, et s’est servi de sa richesse et de son influence auprès du gouvernement pour faire battre et emprisonner des membres de l’ethnie Mbororo sous des prétextes fallacieux. 
 
La commission établie en 2007 pour procéder à la démarcation des frontières entre les tribus Oku et Mbessa dans les départements de Bui et de Boyo dans la région du Nord-Ouest a commencé ses travaux au cours de l’année.

En 2007, les Oku de Bui ont incendié des dizaines de maisons appartenant à des Mbessa, déplaçant plus de 500 personnes. Les Oku prétendaient que les Mbessa cultivaient des terres qui leur appartenaient. Ils les accusaient aussi d’avoir enlevé et violé des femmes Oku, accusation contestée par les autorités locales. Les fonctionnaires de l’administration territoriale locale ont signalé que l’enquête, bien qu’en cours à la fin de l’année, avait été compliquée par des allégations selon lesquelles des dirigeants traditionnels auraient menacé des témoins potentiels.

Les zones septentrionales du pays ont continué de connaître des tensions ethniques entre les Peuls et les Kirdi. Dans les trois régions septentrionales, les Kirdi sont défavorisés par rapport aux Peuls sur le plan socioéconomique et en matière d’éducation.

Les dirigeants peuls traditionnels, les lamibé, ont continué d’exercer un grand pouvoir sur leurs sujets, parmi lesquels se trouvent souvent des Kirdi, et à exiger d’eux le paiement de la dîme ainsi que du travail forcé. Il a été fait état de cas isolés d’esclavage, principalement de Kirdi soumis à des Peuls.

Les autochtones des régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest appuyaient généralement le SDF, parti d’opposition, et en conséquence souffraient de manière disproportionnée d’atteintes aux droits de l’homme commises par le gouvernement et ses forces de sécurité. La communauté anglophone était sous-représentée dans le secteur public. Bien que les habitants de certaines zones francophones, les régions de l’Est, de l’Extrême-Nord, du Nord et de l’Adamaoua, aient émis des plaintes analogues concernant leur sous-représentation et la négligence du gouvernement à leur égard, les anglophones ont déclaré qu’ils trouvaient généralement qu’ils ne bénéficiaient pas d’une juste part des biens et services publics dans leurs deux régions.  Certains habitants de la région anglophone ont cherché à obtenir plus de liberté, l’égalité des chances et un meilleur gouvernement en retrouvant leur autonomie régionale plutôt que par la voie d’une réforme politique nationale, et ils ont formé des organisations quasi-politiques en vue de la réalisation de leurs objectifs.

La police et la gendarmerie ont harcelé et emprisonné des immigrants clandestins du Nigéria et du Tchad. Au cours des rafles, des membres des forces de sécurité ont extorqué des fonds aux personnes qui ne détenaient pas de permis de séjour en règle ou qui n’avaient pas de factures valides pour leurs achats effectués dans les magasins. Certains membres de l’importante communauté d’immigrants nigérians se sont plaints de discrimination et de mauvais traitements de la part de fonctionnaires gouvernementaux. Les immigrants clandestins ont parfois subi du harcèlement, mais moins que les années précédentes.

Peuples autochtones

Quelque 50 000 à 100 000 Bakas, Bakolas et Bagyelis (Pygmées) vivaient principalement dans les zones boisées des régions du Sud et de l’Est (dont ils sont les premiers habitants connus). Bien qu’il n’existe pas de discrimination légale, les autres groupes ont souvent traité les Bakas en inférieurs et les ont parfois soumis à des pratiques injustes et exploitatrices dans le domaine du travail. Selon certains rapports, les Bakas auraient continué de se plaindre de ce que les forêts qu’ils habitent étaient exploitées sans que leur soit versée une juste rémunération. Certains observateurs pensent que l’exploitation forestière constante détruit le système de croyance spécifique des Bakas, axé sur la forêt et les force à adapter leurs systèmes socioéconomiques traditionnels à une société moderne plus rigide comparable à celle des Bantous, leurs voisins.

Les Bakas locaux qui vivent le long de l’oléoduc Tchad-Cameroun ont continué de se plaindre de ne pas avoir été justement indemnisés pour leur terre ou d’avoir été trompés par des personnes qui prétendaient être des représentants des Bakas. En 2006, la commission chargée du suivi de l’oléoduc a organisé un séminaire d’évaluation pour déterminer l’indemnisation des Bakolas et des Bagyelis. La commission a convenu que, malgré une amélioration de l’accès à l’éducation et aux soins de santé, il restait beaucoup à faire pour améliorer les conditions de vie des Pygmées. Il n’a pas été signalé d’autres développements au cours de l’année. Le 3 octobre, la Fondation Camerounaise d'Actions Rationalisées et de Formation sur l'Environnement a mené une étude dans 28 villages des régions du Centre et du Sud qui a confirmé le bien-fondé des plaintes des Pygmées (de la région de Kribi) selon lesquelles ils n’avaient pas encore été pleinement indemnisés. Les constats définitifs de l’étude n’avaient pas encore été publiés à la fin de l’année.

Il était estimé que 95 % des Bakas ne possédaient pas de carte d’identité nationale ; la plupart d’entre eux n’avaient pas les moyens de se procurer les documents nécessaires pour se faire délivrer cette pièce d’identité, qui est exigée pour voter lors des élections nationales. En 2004, Plan International et d’autres ONG avaient lancé un programme visant à éduquer les Bakas sur les droits politiques, qui comportait l’établissement d’une station de radio communautaire dans la région d’Abong Mbang, dans le département du Haut-Nyong (région de l’Est).

En 2005, le Ministère des Affaires Sociales a lancé le Projet d’appui du développement économique et social des Bakas dans la région du Sud. Ce projet d’une durée de trois ans avait pour mission de permettre la délivrance d’actes de naissance et de cartes d’identité nationales à 2 300 Bakas, ainsi que d’aider des centaines d’élèves à s’inscrire dans les établissements d’enseignement. Ce programme était encore en cours à la fin de l’année.

Autres formes d’abus sociétaux et de discrimination

Les activités homosexuelles sont illégales et passibles de peines de prison de six mois à cinq ans et d’amendes de 20 000 à 200 000 francs CFA (40 à 400 dollars). Bien que les autorités n’aient pas engagé de poursuites en vertu de cette loi au cours de l’année, les homosexuels ont été soumis à des harcèlements et à des extorsions de la part des autorités chargées de l’application des lois. Certaines personnes ont eu recours à de fausses allégations d’homosexualité pour harceler des ennemis ou pour extorquer des fonds.

Il y a eu de nouveaux développements dans l’affaire des trois homosexuels arrêtés par les gendarmes à Douala en août 2007. Le 9 janvier, le Tribunal de Grande Instance de Douala a condamné Lazare Baeeg, Emmanuel Balep et Tony Dikongue à six mois de prison et à des amendes de 50 000 francs CFA (100 dollars) pour homosexualité. Leur avocat a interjeté appel et l’affaire était encore en instance à la fin de l’année.

En octobre 2007, le Tribuanl de Grande Instance de Bonanjo a refusé de remettre en liberté six hommes de Douala détenus à la prison de New Bell pour des accusations d’homosexualité. En janvier, le juge a tenu la première audience de l’affaire mais a renvoyé le procès à une date ultérieure pour complément d’enquête. Il n’y avait pas eu de nouveaux développements à la fin de l’année.

Section 6 Droits des travailleurs

a. Liberté syndicale

La loi autorise les travailleurs à former des syndicats du travail et à y adhérer ; toutefois, le gouvernement a imposé de nombreuses restrictions à cette liberté. La loi n’autorise pas la création de syndicats réunissant des travailleurs du secteur public et du secteur privé, ni celle de syndicats comprenant des secteurs différents, même s’ils sont étroitement apparentés.

La loi exige que les syndicats s’enregistrent auprès du gouvernement ; elle autorise les groupes d’au moins 20 travailleurs à établir un syndicat en soumettant un acte constitutif, un règlement intérieur et un casier judiciaire vierge pour chaque membre fondateur. La loi prévoit des peines de prison et des amendes pour les travailleurs qui forment un syndicat et mènent des activités syndicales sans enregistrement. Selon les fonctionnaires gouvernementaux, le gouvernement délivre l’attestation d’enregistrement dans un délai d’un mois, mais des syndicats indépendants, en particulier des syndicats du secteur public, ont éprouvé des difficultés à se faire enregistrer. C’est ainsi, par exemple, que le Syndicat National des Enseignants du Supérieur n’était pas enregistré officiellement ; il menait néanmoins ses activités sans interférence du gouvernement.

Les syndicats enregistrés font l’objet d’interférences gouvernementales. Le gouvernement choisit les syndicats avec lesquels il mène des négociations ; certains syndicats indépendants ont accusé le gouvernement de créer de petits syndicats non représentatifs disposés à accepter les positions gouvernementales et avec lesquels il peut négocier plus facilement. Certaines dispositions de la loi sur le travail sont restées lettre morte étant donné que la présidence n’a pas signé les décrets d’application y afférents.

Le code du travail reconnaît expressément le droit des travailleurs à faire grève, mais seulement après un arbitrage obligatoire. Les travailleurs ont exercé ce droit au cours de l’année : des grèves ont eu lieu dans certaines universités, à la société nationale des chemins de fer CAMRAIL) et dans les services des Postes du Cameroun. Les décisions d’arbitrage sont juridiquement contraignantes, mais souvent inapplicables lorsque les parties refusent de coopérer. Il n’est pas rare que ces décisions soient annulées ou tout simplement ignorées par le gouvernement ou les employeurs. Le droit de grève n’est pas accordé aux fonctionnaires, aux employés du système pénitentiaire ou aux travailleurs responsables de la sécurité nationale. Au lieu de faire grève, les fonctionnaires doivent présenter leurs revendications directement au ministère dont ils relèvent ainsi qu’au Ministère du Travail.

b. Liberté syndicale et de négociation collective

La Constitution et la loi garantissent le droit à la négociation collective entre les travailleurs et la direction ainsi qu’entre les fédérations du travail et les associations d’entreprises dans tous les secteurs de l’économie.

Lorsque des différends du travail ont surgi, le gouvernement a choisi le syndicat avec lequel il souhaitait négocier, en excluant sélectivement certains représentants syndicaux. Une fois les accords conclus, il n’y avait pas de mécanismes en place pour les faire appliquer ; certains accords conclus entre le gouvernement et des syndicats ont été ignorés par celui-là.

En novembre, les syndicats des transports ont organisé une conférence de presse sur la question de savoir pourquoi les accords conclus avec le gouvernement en février n’avaient pas été appliqués, mais le sous-préfet de Yaoundé II a déclaré cette conférence de presse illégale et l’a interdite.

La Constitution et la loi interdisent la discrimination antisyndicale et les employeurs coupables d’une telle discrimination sont passibles d’amendes pouvant atteindre environ un million de francs CFA (2 000 dollars). Toutefois, les employeurs jugés coupables n’ont aucune obligation de dédommager les travailleurs victimes de discrimination ou de restaurer leur emploi aux travailleurs licensiés. Le Ministère du Travail et de la Sécurité Sociale n’a signalé aucune plainte pour discrimination antisyndicale au cours de l’année, bien que des rapports crédibles dans la presse aient fait état de cas de harcèlement de dirigeants syndicaux.

Il n’existe pas de zones franches d’exportation.

c. Interdiction du travail forcé ou obligatoire

La Constitution et la loi interdisent le travail forcé ou obligatoire, notamment celui des enfants ; des rapports ont toutefois fait état de ce genre de pratiques. Des autorités carcérales ont fait employer des prisonniers par des entreprises privées ou comme main-d’œuvre pour divers travaux publics municipaux et les fonds produits par ces activités ont généralement été empochés par les administrateurs des prisons et n’ont pas été remis aux détenus.

La servitude héréditaire s’est pratiquée dans les régions septentrionales.

Dans les régions du Sud et de l’Est, certains Bakas, y inclus des enfants, ont continué d’être soumis à des pratiques injustes et exploitatrices par des propriétaires terriens et ont été notamment forcés de travailler sans rémunération dans les exploitations agricoles de ceux-ci à la saison des récoltes.

d. Interdiction du travail des enfants et âge minimum de travail

La loi protège généralement les enfants de l’exploitation au travail et prévoit des sanctions allant d’amendes à des peines de prison pour les contrevenants ; le travail des enfants est néanmoins toujours un problème. Le gouvernement interdit expressément le travail forcé et obligatoire des enfants, mais des rapports ont fait état de l’existence de ces pratiques.

La loi fixe à 14 ans l’âge minimum du travail pour les enfants, interdit le travail de nuit et énumère les travaux que les enfants de moins de 18 ans ne sont pas autorisés à effectuer. Parmi ces travaux figurent la manutention de lourdes charges, les travaux dangereux et malsains, le travail dans des lieux confinés et la prostitution. La loi précise également que la durée de la journée de travail des enfants ne peut pas dépasser huit heures. Les employeurs sont tenus de dispenser une formation aux enfants de 14 à 18 ans, et les contrats de travail doivent contenir une clause relative à la formation pour les enfants mineurs. L’interdiction du travail de nuit n’a pas été appliquée de manière efficace.

Le travail des enfants se pratiquait principalement en milieu urbain et dans le secteur informel, consistant dans des activités de vendeur de rue, de lavage de voiture, de travail agricole et de travail de maison. Beaucoup de vendeurs de rue avaient moins de 14 ans. Des enfants travaillaient comme personnel de maison et certains étaient prostitués. Des rapports crédibles ont signalé que dans le nord, des enfants de ménages nécessiteux étaient placés dans d’autres familles pour y effectuer du travail ménager rémunéré.

Il a été signalé que certains parents donnaient leurs enfants à des marabouts (religieux traditionnels) à Maroua, dans l’Extrême Nord, pour qu’ils apprennent le Coran et se préparent à devenir eux-mêmes des marabouts. Des rapports ont toutefois indiqué que certains enfants portaient des entraves de pieds et étaient obligés d’effectuer des travaux forcés.

Les parents considéraient le travail des enfants comme une tradition ainsi qu’un rite de passage. En milieu rural, des membres de la famille employaient souvent des jeunes, notamment des filles, en tant qu’aides domestiques, et cela laissait rarement le temps aux enfants de faire des études. En milieu rural également, beaucoup d’enfants commençaient à travailler très jeunes dans les exploitations familiales. Selon certaines ONG, l’industrie du cacao aurait également employé des enfants, la plupart d’entre eux venant des trois régions du nord et de la région du Nord-Ouest.

Le Ministère des Affaires Sociales et le Ministère du Travail et de la Sécurité Sociale étaient responsables de l’application des lois en vigueur sur le travail des enfants au moyen d’inspections des locaux des entreprises enregistrées ; toutefois, le gouvernement n’avait pas alloué de ressources suffisantes pour assurer l’efficacité du programme d’inspection. En outre, les travaux interdits par la loi ne comprenaient pas les travaux ménagers qui, dans de nombreux cas, dépassaient les capacités des enfants. En 2005, le gouvernement employait 58 inspecteurs du travail pour enquêter sur les cas de travail des enfants.

L’OIT a continué d’œuvrer avec des responsables de dossiers y afférents au sein des divers ministères et organismes menant des activités de lutte contre la traite des personnes ; elle a également mené des enquêtes dans tout le pays et a coopéré avec des organisations locales.

e. Conditions de travail acceptables

En juin, le gouvernement a augmenté le salaire minimum interprofessionnel garanti et l’a fixé à 28 246 francs CFA (56 dollars) par mois. Ce salaire ne permet toutefois pas au travailleur moyen d’assurer à sa famille un niveau de vie décent. Le Ministère du Travail et de la Sécurité Sociale était chargé de veiller au respect du salaire minimum dans tout le pays.

La loi fixe la durée standard de la semaine de travail à 40 heures dans les entreprises non agricoles, publiques et privées, et à 48 heures dans l’agriculture et les secteurs connexes. Elle prévoit des exceptions pour les gardes et les pompiers (56 heures par semaine), le personnel du secteur des services (45 heures par semaine), et le personnel de maison et de restaurant (54 heures par semaine). La loi exige un repos hebdomadaire minimum d’au moins 24 heures consécutives. Les heures supplémentaires sont rémunérées à un taux allant de 120 à 150 % du tarif horaire normal compte tenu du nombre et du fait que ce travail doive être effectué le week-end ou tard le soir. Le service obligatoire excessif est interdit. Des inspecteurs du Ministère du Travail et de la Sécurité Sociale étaient chargés de surveiller l’application de ces normes, mais ils ne disposaient pas des ressources nécessaires pour assurer un programme d’inspection complet.

Le gouvernement fixe les normes en matière de santé et de sécurité. Des inspecteurs et des médecins du travail du Ministère du Travail et de la Sécurité Sociale étaient chargés de surveiller l’application de ces normes, mais ils ne disposaient pas des ressources nécessaires pour assurer un programme d’inspection complet. La loi ne donne pas aux travailleurs le droit de se soustraire aux situations dangereuses pour leur santé ou leur sécurité sans s’exposer à un licenciement.

http://french.yaounde.usembassy.gov/humanrights2008.html

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